Prix relève Sollio : Matt & John McRae – De semences, de pétrole et de sirop d’érable
Après une grande première l’an passé, le Prix relève Sollio fait une deuxième incursion en Ontario chez les clients Agromart pour rencontrer trois finalistes, trois fermes actives en production céréalière ayant leur spécificité : l’une transforme ses grains en bières, l’autre cultive grand en rentabilisant ses machineries avec les travaux à forfait et la dernière table sur la production de semences.
Visite des juges du concours, production de vidéos, présence des finalistes et de leur conseiller agronomique au gala lors de l’assemblée générale annuelle de Sollio Groupe Coopératif : le Prix relève Sollio fait œuvre utile en mettant en exergue des modèles de transfert et d’établissement fructueux – c’est son mandat depuis plus de 20 ans –, mais également en multipliant la visibilité de belles histoires et les occasions d’échanges culturels entre les agriculteurs de partout au Canada.
Échanger sur nos pratiques d’affaires et partager nos bagages culturels par l’entremise d’un concours? Tous gagnants!
En se rendant à la ferme de Matt et de John McRae située dans le rang Petrolia Line à Alvinston, près de la ville de Petrolia et de la non moins pétrolière ville de Sarnia, on aperçoit ici et là dans les champs des pompes à pétrole à tête de cheval, décor typique pour cette zone pétrolifère.
Matt McRae travaille d’ailleurs dans une raffinerie à Sarnia alors que son frère John s’active dans une usine chimique. On serait tenté de dire que l’agriculture est une activité à temps partiel pour ces deux frères diplômés dans des techniques industrielles, mais, à l’évidence, les gars mènent une vie double, malgré les 352 hectares (870 acres) cultivés.
Matt et John ont appris à cultiver à la meilleure école : l’université du carré de sable! La bonne entente a toujours régné entre eux. « Nous avons les mêmes buts, mais nous empruntons parfois des chemins différents pour les atteindre », exprime Matt. Leurs parents Joan et Alfred McRae ont longtemps élevé des porcs sur litière de paille, notamment dans un bâtiment fonctionnel et rudimentaire, mais ce dernier a été converti depuis en une unité de criblage, de traitement phytosanitaire et d’ensachage de semences qui fait le bonheur d’une centaine de clients qui viennent faire nettoyer à forfait leur récolte pour la ressemer. L’Agromart Lakeside Grain and Feed utilise aussi les services des McRae pour s’approvisionner en semences de soya et de blé. Avec deux moissonneuses-batteuses, les frères offrent également leurs services aux agriculteurs environnants, sans parler de leur planteur, de leur pulvérisateur et de leur séchoir qui servent aussi d’autres entreprises.
Pour bâtir leur avoir propre, les frères à la ferme éponyme sont restés à l’affût des occasions. C’est en 2014 que leurs efforts ont été couronnés de succès avec l’achat de leur première terre, très argileuse comme toutes celles de leur région. Depuis, le duo reste sur le qui-vive. « On connaît notre capacité d’emprunt et elle est préapprouvée, mentionne Matt. Quand on rencontre le banquier, c’est surtout pour prendre un café et discuter de choses et d’autres. » Alfred ajoute : « Si un producteur veut vendre une terre ou un équipement ou qu’un encan a lieu, il faut savoir vite à quoi s’en tenir. » C’est cette première acquisition, quand John et Matt venaient tout juste de terminer leurs études à 22 et à 20 ans respectivement, qui leur a permis de construire leur historique financier et d’asseoir leur sérieuse réputation.
Brian Hoven, conseiller agronomique du Agromart Lakeside Grain and Feed , peut compter sur les doigts d’une seule main les fermes qu’il conseille qui sont parties de zéro. La ferme Matt & John McRae est l’une d’elles. « Les coûts pour démarrer une ferme sont prohibitifs, notamment parce que les terres sont chères dans notre région, fait-il valoir, mais Matt et John sont ouverts aux nouvelles idées, ils cherchent des réponses et n’ont pas peur de poser des questions et de faire des calculs.»
Côté cour, le crible, capable de traiter 100 boisseaux à l’heure, ne satisfait pas les frangins qui échafaudent des plans pour améliorer sa capacité de traitement et fluidifier les opérations quand les voitures à grains des voisins s’alignent dans la cour. L’entreprise compte sa propre balance à camion. Côté jardin, les cultures de la ferme sont le soya, le maïs et le blé tendre rouge d’automne, dans une moindre mesure (32 hectares [80 acres] cette année). Dans leur région, certains s’essaient à la culture du seigle. Les McRae ont aussi tenté de cultiver du canola, noyé quatre jours après le semis par 23 centimètres de pluie… Semenciers, les frères sont habitués à la nouveauté et au testage de variétés dans des essais culturaux. La prochaine étape sera de s’essayer à l’échantillonnage géoréférencé des sols et aux applications à taux variable.
Et la qualité de vie? Les plaisirs quotidiens résident dans des choses simples, un bon repas en famille, par exemple. Pour leurs mentors et parents Alfred et Joan, sans qui rien ne serait possible, l’entreprise reste au cœur de leur vie, sauf lors du mois de vacances qu’ils s’accordent en Floride. Pour Alfred, le travail de ferme ne manque pas. Pour Joan, jardinage, comptabilité et gardiennage du poupon Russell, fils de John et de sa conjointe Jen, ponctuent les journées.
Si leur carrière parallèle à Sarnia amène des liquidités pour la ferme et la famille et permet de poursuivre l’expansion de l’entreprise malgré des marges minces et des investissements plus risqués, le rêve ultime resterait de quitter ces emplois sécurisants afin d’exploiter à temps plein leur ferme céréalière. Heureusement, John, mais surtout Matt, compte aussi sur les « revenus » d’une érablière et d’une cabane à sucre savamment installée dans un ancien silo à grains.
Une « grosse » exploitation de 175 entailles!
Photo par Christophe Champion
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