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Ferme Silvercrest : Le chromosome X de l’élevage laitier

Marie-Pier G. Vincent a la bosse de la génétique et est la patronne de son entreprise, à Saint-Valérien-de-Milton. Dans sa famille, le verbe « élever » se conjugue impérativement au féminin, depuis trois générations.

Dresser, tondre, projeter. Si les semaines comptaient huit jours, Marie-Pier consacrerait la journée supplémentaire à sa passion dévorante de l’élevage. Pas surprenant qu’elle ait été présidente de l’Association des jeunes ruraux du Québec (AJRQ) de 2012 à 2015, organisation qui regroupe 1200 membres dans 35 cercles locaux. Aujourd’hui, c’est au poste de deuxième vice-présidente des Producteurs de lait de Montérégie-Est qu’elle milite, représentante des 658 fermes laitières de sa région (13 % du total provincial).

S’engager, débattre, manifester. Si les semaines comptaient neuf jours, Marie-Pier consacrerait une journée de plus à la promotion du lait, son secteur d’activité économique. Jeune, femme et allumée, elle est une figure médiatique recherchée. Les trois derniers accords commerciaux internationaux ont fait mal aux acquis en production laitière, certes, mais aux menaces à la gestion de l’offre s’ajoutent quelques difficultés au sein même des instances auxquelles Marie-Pier siège ou a siégé. Les boys’ clubs sont encore nombreux, et il peut paraître intimidant pour une femme de les investir. Ce n’est jamais un machisme souligné à double trait, mais de petites subtilités, du non-dit, des sous-entendus, de petits gestes innocents que décodent davantage les femmes. « Surtout quand on exprime ses opinions », lance Marie-Pier.

Traire, nourrir, gérer. Les sept autres jours de la semaine, la Valériennoise s’active. Elle a démarré la Ferme Silvercrest en avril 2016, achetant 34 kg de quota, louant une étable encore en ordre, acquittant au prix du marché les fourrages de la Ferme Vinbert, propriété de ses parents, Jacinthe Guilbert et Mario Vincent, et de son frère Alexandre. Après son diplôme de l’ITA et jusqu’à son établissement, Marie-Pier n’a pas chômé. Elle a fait un certificat en productions animales à l’Université Laval et s’est envolée pour la Nouvelle-Galles-du-Sud, en Australie, pour confronter sa vision de la ferme québécoise avec celle de la ferme australienne. En 2015, c’est en Alberta que la jeune femme a posé ses valises pour materner, pendant cinq mois, des bouvillons dans un parc d’engraissement de 60 000 têtes.

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Chromosome X, génération Y

La femme de 28 ans aime élever, mais… trop? L’éleveuse s’oblige à inséminer la moitié de ses vaches avec de la semence de taureaux de boucherie, qui ne coûte pas plus cher que celle de taureaux laitiers. Marie-Pier collabore au Comité de mise en marché des veaux laitiers des Producteurs de bovins du Québec.

Endettée et avec seulement 40 vaches en lactation, Marie-Pier ne peut laisser des kilos de lait dans les pis. La productivité est donc astronomique. Annuellement, les vaches excrètent en moyenne 13 900 kg de lait, et la moyenne quotidienne de gras du lait par vache culmine actuellement à 1,6 kg. L’excellence génétique explique en partie ces performances intarissables. La MCR combinée moyenne du troupeau était de 759 en 2017, de 832 en 2018 et de 911 pour le premier trimestre de 2019. Pas trop mal pour un troupeau composé d’une douzaine de préfixes, issus de vaches des quatre coins du Canada et des États-Unis!

Produire à l’optimum est donc obligatoire pour la viabilité de l’établissement, tout comme l’emploi extérieur de Marie-Pier, qui assure, trois jours par semaine, le service à la clientèle pour une entreprise de logiciels de gestion de troupeau. Mélanie Deslandes, directrice de comptes de la Banque CIBC, a cru en l’entrepreneure. « L’acceptation du financement de la Ferme Silvercrest était basée sur la personnalité, l’expérience et les connaissances de Marie-Pier, commente cette agronome. Autrement dit, une autre personne sans les mêmes qualités n’aurait pas passé au financement. »

Pourquoi Marie-Pier a-t-elle choisi un chemin plus sinueux que celui consistant à se joindre à la ferme familiale? « Marie-Pier et notre fils Alex ont deux visions différentes de la production laitière et sont indépendants de nature », explique Jacinthe, qui les a tricotés. « Or les entreprises agricoles sont tellement exigeantes qu’il faut pouvoir s’identifier complètement à ce qu’on fait, et donc diriger sa propre entreprise. »

 

Lisez le reportage complet dans l’édition de juillet-août 2019 du Coopérateur!

Étienne Gosselin

QUI EST ÉTIENNE GOSSELIN
Étienne collabore au Coopérateur depuis 2007. Agronome et détenteur d’une maîtrise en économie rurale, il œuvre comme pigiste en communication et dans la presse écrite et électronique. Il habite Stanbridge East, dans les Cantons-de-l’Est, où il cultive le raisin de table commercialement.

etiennegosselin@hotmail.com

QUI EST ÉTIENNE GOSSELIN
Étienne collabore au Coopérateur depuis 2007. Agronome et détenteur d’une maîtrise en économie rurale, il œuvre comme pigiste en communication et dans la presse écrite et électronique. Il habite Stanbridge East, dans les Cantons-de-l’Est, où il cultive le raisin de table commercialement.