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«Le succès futur de votre troupeau dépend du bon départ de vos génisses!»

Cet en-tête coiffait une publicité diffusée dans Le Coopérateur agricole d’avril… 1980! Rien de nouveau sous le soleil, direz-vous sans surprise! Comme quoi les choses ne changent pas, ou parfois si peu. Il y a de ces conseils de gestion qui ont fait leurs preuves et qui demeureront, à n’en pas douter, toujours d’actualité.

La Division des moulées et fertilisants de la Coopérative fédérée de Québec présentait alors un programme d’alimentation qui permettait « d’obtenir un gain hâtif, si important dans les premières semaines de vie de vos génisses ». Ce programme comportait entre autres la « moulée début-veau CO-OP 17-1.82 (excellente saveur, haute énergie) [qui] amènera vos génisses à consommer des aliments secs le plus hâtivement possible ». « Cette croissance rapide au début de leur existence vise à faire vêler vos plus grosses taures aux poids et conditions désirés par la race à 24 mois d’âge », disait-on également en substance. Aujourd’hui encore, comme à l’époque, un premier vêlage à 24 mois pour les taures figure parmi les objectifs de nombreuses entreprises laitières.

À peine quelques années plus tôt, dans l’édition de décembre 1977 du Coopérateur, un reportage sur Le service CO-OP en productions animales indiquait que « la plupart des troupeaux ont des problèmes de reproduction; c’est peut-être le malaise no 1 chez les bons troupeaux ». Voilà qui venait sans doute en partie entraver l’objectif de réussir ses premiers vêlages à 24 mois. Un outil de gestion était même proposé aux éleveurs : le CRTL (calendrier de reproduction des troupeaux laitiers), que l’on suggérait à tous les producteurs d’utiliser, avec l’aide de leur représentant CO-OP. L’éleveur s’attendait notamment à ce que ce dernier « vérifie régulièrement le taux de croissance [et le poids] de ses sujets de reproduction. […] afin de l’aider à sortir le maximum du potentiel génétique de son troupeau ». Il allait bien entendu de soi que le producteur d’alors, tout comme celui d’aujourd’hui, attachait énormément d’importance à l’alimentation de son troupeau.

Dans l’édition de novembre 1990 du Coopérateur agricole, on signalait que la famille Blanchette, propriétaire de la Ferme La Présentation, avait réussi – et c’était monnaie courante chez elle – à faire vêler ses taures à 23 mois d’âge, au poids de 570 kg. Le reportage avait fait l’objet de la page couverture.

« Vivre avec le quota », plus de 50 ans après son instauration

Publicités, articles, commentaires et impressions générales : le quota, dans les années 1970, faisait l’objet de nombreuses discussions. Dans Le Coopérateur agricole de mars 1978, le technologiste agricole Gaétan Martineau écrivait l’article « Vivre avec le quota », où il déclarait qu’il était question de ce fameux quota à chaque réunion et assemblée depuis deux ans. Tous les acteurs de la production laitière devaient se rendre à l’évidence : le quota était là pour de bon et il fallait apprendre à vivre avec. Trois moyens d’y arriver avaient alors été offerts aux producteurs laitiers :

  1. Augmenter les prix des produits vendus.
  2. Augmenter le volume de production.
  3. Augmenter l’efficacité de la ferme à l’intérieur du quota qu’elle détient.

Ce qui était vrai en 1978 a manifestement suivi les producteurs jusqu’en 2022! Le Coopérateur s’est quant à lui fait le vecteur des transformations à la ferme. En effet, dans les dernières décennies, la revue a publié de nombreux renseignements sur les méthodes pour augmenter la productivité des vaches laitières, à travers des articles techniques ou des reportages à la ferme.

Un bon exemple des résultats obtenus grâce au troisième moyen? La Ferme Val-Bisson, dont un compte-rendu historique est paru dans l’édition de mai-juin 2022, produisait en moyenne 6800 kg avec 62 vaches en 1975. En 2020, sa production moyenne était passée à 12 781 kg pour un troupeau de 65 vaches.

Une production phare

La production laitière a toujours été au cœur du développement de l’agriculture québécoise. Les progrès technologiques et de gestion d’élevage qu’elle a connus au fil des décennies l’ont placée parmi les plus avancées au monde. Grâce à l’électrification de toutes les entreprises agricoles, elles ont pu se doter, au cours des ans, d’équipements qui ont nettement favorisé leur productivité. La production de lait par vache est un indicateur clé de la performance des fermes laitières. Elle est passée, en moyenne, de 3000 kg en 1972 à 9600 kg en 2022.

S’ils persistaient encore dans quelques fermes au début des années 1970, la traite manuelle et le transport du lait à l’aide de bidons ont fait place aux trayeuses, voire aux salles de traite pour les plus grandes entreprises, qui acheminaient alors le lait sans effort vers des réservoirs réfrigérés. Aujourd’hui, les salles de traite ont toujours la cote, mais les carrousels et robots de traite s’imposent dans de plus en plus d’exploitations.

Communément appelé « contrôle laitier », le Programme d’amélioration des troupeaux laitiers du Québec (PATLQ) permet aux producteurs de suivre l’évolution des performances de leurs élevages et d’y apporter les améliorations nécessaires. Ils y adhèrent en grand nombre. Dans le Coopérateur de juin 1975, on apprend que Conrad Ruel, producteur laitier de Sainte-Sophie-de-Mégantic, y a inscrit la 100 000e vache! Une Holstein qui donne alors 57 lb de lait par jour et qu’il espère voir produire, au total, entre 13 000 et 14 000 lb de lait avant la fin de l’année.

Dans les premiers numéros du magazine, de nombreux articles et publicités réfèrent au PATLQ. Il était omniprésent et la participation était très encouragée. Dans les quelques reportages à la ferme des débuts de la revue, les producteurs interrogés sont assez unanimes : la PATLQ a été un atout important pour l’augmentation de la productivité. Aujourd’hui, de plus en plus de producteurs utilisent l’outil Lactascan, développé par Sollio Agriculture, pour effectuer la gestion de leur entreprise.

Grâce à l’amélioration éclatante de la génétique des troupeaux, des éleveurs adoptent une nouvelle technologie qui en multipliera encore plus le potentiel : la transplantation embryonnaire. Elle permet notamment aux éleveurs de faire le commerce de sujets de qualité ici et dans le monde entier. Un reportage réalisé à la Ferme Bois Mou, en avril 2016, raconte l’histoire de la famille de Robert Lefebvre. Celui-ci aurait été le premier de la région du Centre-du-Québec à réussir une transplantation embryonnaire dans les années 1970.

Une autre technologie voit le jour quelques décennies plus tard : la génomique, que le magazine, en couverture du numéro d’octobre 2008, qualifie littéralement de « révolution au service des producteurs ».

Le Québec compte aujourd’hui un peu plus de 4600 fermes laitières et près de 363 000 vaches en lactation, pour une production totale de 3,5 milliards de litres de lait*. En 1972, il y a 50 ans, on dénombrait 36 000 exploitations et 885 000 vaches, pour une production (en 1976**) de 2,7 milliards de litres de lait. Ces chiffres témoignent de la hausse fulgurante de l’efficacité des entreprises laitières québécoises au cours des 50 dernières années.   

* En 2021.
** Plus anciennes données disponibles (CCL).

 


Découvrez les articles mentionnés dans ce texte ici : 


Photo d'en-tête : Coopérateur d'avril 1978, Archives – HEC Montréal, Fonds de la Coopérative fédérée de Québec, P012

Patrick Dupuis agr. et Félicie Tremblay-Jacques