Année après année, les sondages le confirment. Nous pratiquons l’une des professions les plus admirées du public. En 2024, selon Léger Marketing, nous figurons au 4e rang, tout juste derrière les pompiers, les paramédics et les infirmières.
Voilà une bonne nouvelle pour notre milieu et notre relève. Savoir qu’on a confiance en nous, en plus de pratiquer un métier essentiel dans un secteur d’activité névralgique pour la société, a de quoi rendre fier. Mais loin de moi l’idée de voir la vie agricole avec des lunettes roses…
Quand je tourne le regard vers l’Europe, je vois bien que les producteurs agricoles en ont assez. Partout, on réclame un coup de barre dans les façons de gérer l’agriculture : normes excessives face à la concurrence étrangère, politiques agricoles inadaptées, réglementations vertes contraignantes, soutien financier insuffisant, paperasserie envahissante. La hausse des taxes sur l’essence a été l’un des déclencheurs des manifestations auxquelles on assiste. Les producteurs étouffent sous les exigences et peinent à tirer le plein potentiel de leurs exploitations.
Et ils le font savoir bruyamment. Leurs voix se font entendre sur toutes les tribunes, et le grondement de leurs tracteurs résonne sur les routes du continent. En France, le président Macron a même été hué à l’ouverture de la 60e édition du Salon International de l’Agriculture.
Yves Le Morvan, responsable des filières et des marchés pour le think tank français Agridées, a fait état de la situation lors de la dernière assemblée générale de Sollio Groupe Coopératif, le 29 février, alors qu’il s’adressait, depuis la France, aux délégués de notre réseau rassemblés à Montréal. La suradministration, la baisse des revenus et la faible compétitivité des filières agricoles françaises plombent la rentabilité des exploitations. Il faut redonner un souffle à l’économie agricole et la ramener au premier plan, a-t-il insisté.
Les producteurs ont été entendus, en partie du moins. La Commission européenne a pris des mesures pour réduire la bureaucratie. Des engagements concrets pour répondre à la crise agricole sont attendus.
Ici, qu’en est-il? Bien que les enjeux soient différents, nos préoccupations sont du même ordre que celles de nos homologues européens. Les producteurs et productrices de chez nous se butent aussi à des impératifs environnementaux, économiques et sociaux. Ils manifestent leur mécontentement et souhaitent être écoutés.
La demande d’allègement réglementaire que l’on réclame depuis longtemps semble finalement avoir été entendue par nos élus. Le ministre de l’Agriculture, André Lamontagne, a annoncé qu’il souhaitait travailler « afin de réduire le fardeau réglementaire et administratif des producteurs agricoles » et ce, pour « donner de l'air aux agriculteurs et aux agricultrices [et] favoriser la croissance de leurs entreprises ».
Nous avons été consultés, et nous avons martelé l’importance que ces futurs allègements servent à créer de la richesse dans nos fermes, à redonner du dynamisme au milieu et à s’assurer qu’il demeure compétitif et à l'avant-garde. On le sait, la faible rentabilité qui afflige certains secteurs, malgré l’augmentation des revenus, découle en bonne partie de l’inflation et de la hausse des taux d’intérêt. Ces derniers pourraient d’ailleurs possiblement baisser prochainement. Autres lueurs d’espoir : les prix des céréales sont à la baisse et la situation dans le porc semble vouloir s’améliorer graduellement. Et vous savez ce qu’on dit, si les premières récoltes de l’année sont bonnes, ça augure bien pour le reste! Eh bien, le temps des sucres s’annonce déjà excellent. J’ai confiance!
Et il en faut pour pratiquer notre métier. Même si les défis sont nombreux, notre relève continue de se manifester pour prendre le relais avec audace, ambition et talent. C’est tout en leur honneur et il faut les encourager et les soutenir.
Ce qui se déroule dans le monde agricole, ici comme ailleurs, attire l’attention de la population sur la réalité des producteurs et le rôle crucial qu’ils jouent dans la société. Voilà qui met la table pour la future Politique bioalimentaire que doit rédiger le gouvernement du Québec et qui devra, comme je l’ai déjà mentionné dans cette tribune, placer les producteurs agricoles à l’avant-plan.
Sur ce, je vous souhaite une bonne saison des semis!