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Ferme du Clan Goulet : Le savoir-faire des humains, le savoir-traire des robots

Nutrinor coopérative

La Ferme du Clan Goulet produit beaucoup de lait par travailleur… ou par robot! Quand la main-d’œuvre se fait rare et que les tâches sont répétitives, les robots savent faire, savent traire!

Êtes-vous robophile, robophobe ou un peu des deux? Louis Taillon, gendre de Jean-Yves Goulet et Carole Tremblay, n’a rien contre les robots. On pourrait même dire que c’est la technologie qui l’a réuni, en 1999, à sa conjointe, Caty, fille de Jean-Yves et Carole : c’est par télécopies interposées qu’une première rencontre s’est concrétisée entre la belle de Saint-Augustin et la bête de Saint-Prime, de part et d’autre du lac Saint-Jean!

À la Ferme du Clan Goulet, deux premiers robots sont venus prêter main-forte en décembre 2014 dans la nouvelle vacherie, suivi d’un troisième en 2015 et d’un dernier en 2017, installés dans l’ancienne étable. De 1970 à mars 2015, on a trait les vaches dans une salle de traite, poussant même à trois traites par jour de 2012 à 2014. Durant ces années, traire 180-190 vaches par jour nécessitait jusqu’à neuf employés sur deux semaines, une gestion de personnel cauchemardesque ayant mené à des mammites, à une baisse de production et à du quota non produit. Cet épisode de triple traite a marqué l’esprit des associés, qui ont décidé d’accorder leur confiance aux droïdes, perfectionnés et popularisés au tournant des années 2000.

Ressources robotiques

Produire 253 kg de quota avec l’équivalent de quatre employés à temps plein? Comparativement aux fermes de sa région, l’entreprise emploie sensiblement le même nombre de personnes, mais produit deux fois plus de lait! Au niveau provincial, la Ferme du Clan Goulet (9887 hl/unité de travail-personne) surpasse aussi la moyenne des fermes de 100 vaches et plus (5296 hl/UTP), de même que la moyenne des fermes de 100 vaches et plus en traite robotisée (5625 hl/UTP). Avec 2,2 UTP famille et 1,7 UTP employé, pour 3,9 UTP totales, le clan réussit à produire très exactement 100 kg de quota supplémentaires par rapport à la moyenne des fermes de 100 vaches et plus.

« Ce n’est pas plus d’ouvrage qu’une ferme de 60-70 vaches », assure pourtant Louis. « La robotisation permet d’accroître l’efficacité du travail », corrobore l’agronome Valérie Grenier, conseillère en gestion du Groupe multiconseil agricole Saguenay–Lac-Saint-Jean. « Cependant, ça n’explique pas 100 % des résultats de la Ferme du Clan Goulet : il y a probablement une grande efficacité de l’ensemble des tâches entourant la production. »

Et c’est bien ce qu’on constate : le tandem de Jean-Yves et Louis, respectivement 63 et 45 ans, ne montre pas de signes de conflit générationnel, de lancinantes dualités d’idées. « On prend des décisions conjointes et on se répartit les secteurs », exprime simplement Jean-Yves, responsable de la gestion du troupeau et de la logistique, alors que Louis s’emploie surtout à l’alimentation, à la gestion des robots de traite, à l’analyse des données et aux opérations des champs. Si Jean-Yves ne pitonne pas excessivement, ce n’est pas d’hier qu’il se frotte aux nouvelles idées. Par exemple, on garde les quadrupèdes sur plancher latté depuis 1981! Concernant le plancher des vaches, la pédicure est une pratique mise en place au tarissement, au milieu de la lactation et au besoin, car on taille les onglons chaque semaine, sans plus de délai. Quant à l’intervalle de vêlage, de 364 jours en moyenne, il impressionne.

Ressources humaines

Ils sont forts en robots, mais pendant de longues minutes, c’est d’un humain, Jérémie Tremblay, bon employé toujours de bonne humeur, que Louis et Jean-Yves causent. « C’est un gars travaillant et attentif dans tout, qui excelle dans les réparations et dans la taille des onglons, révèle Jean-Yves. C’est un employé modèle, même s’il n’est pas matinal! »

Autrement, il y a le père de Louis, Camil, qui aide aux semis et aux fourrages. Caty contribue aussi en pilotant la faucheuse automotrice, en plus de faire un DEP en comptabilité. Quant au fils du couple, Raphaël, il a commencé son DEC en génie agromécanique à l’ITAQ (Saint-Hyacinthe) : la ferme aura bien besoin d’un bon technicien et mécanicien capable de réparer des machines dans l’avenir!

Collaborant depuis sept ans avec la ferme, l’agronome Richard Blackburn, expert-conseil en ruminants pour Nutrinor coopérative, joue bien son rôle d’accélérateur d’innovation en visitant l’entreprise toutes les deux semaines. Ce natif de Chicoutimi côtoie vaches et vachers depuis longtemps : il a commencé à travailler dans des fermes dès l’âge de huit ans, son oncle étant producteur de lait et son père équipementier laitier.

Quand Richard a commencé à accompagner la ferme, elle produisait une moyenne de 25 kg de lait par jour par vache : elle pousse aujourd’hui la barre à 37 kg, ce qui obligera le remplacement d’un réservoir, car les deux de 8000 litres pourraient ne plus suffire à court terme! « Ce que j’aime de ces gens-là, c’est leur ouverture aux changements. L’été dernier, par exemple, on a essayé un nouveau répulsif contre les mouches domestiques à base d’ail, intégré dans la base de minéraux alimentaires – le genre d’intrant à moindre risque pour la santé et l’environnement qui s’inscrit dans notre Pacte agricole durable. » Ce pacte, issu d’une démarche volontaire et évolutive, témoigne des efforts de longue date de Nutrinor pour articuler le développement durable, aussi bien dans ses opérations que chez ses 1051 fermes membres, dont 271 sont en production laitière.

Ressources financières

La Ferme du Clan Goulet a aussi quelques astuces du côté des finances. L’argentière du groupe, Carole, ne mise plus sur une marge de crédit, mais privilégie maintenant la carte de crédit, dont la limite est très élevée. Cette carte permet de payer prestement les fournisseurs. Pour éviter des frais de crédit, le solde est entièrement payé chaque… semaine! La carte permet d’accumuler des points en prime. On utilise également la formule de paiements anticipés pour acheter certains intrants, comme des engrais, des semences ou du carburant, ce qui permet des rabais de quelques pour cent.

« On a de forts investissements, mais couplés à de forts revenus », souligne Jean-Yves. Par exemple, des silos-tours à ensilage se dressent dans le ciel, mais on utilise aussi des silos-sacs pour bâtir six mois de stocks de réserve et compter sur deux systèmes en cas de défaillance. Au champ, doubleur d’andains et citerne à lisier de 6100 gal permettent de gagner du temps lors des chantiers.

L’« objectif Lune » de l’entreprise : augmenter encore la production de 50 kg de quota pour la porter à 300 kg totaux. C’est à ce niveau qu’on rentabilisera au maximum les infrastructures et les équipements, qu’ils soient mécanisés, robotisés ou automatisés!

Photo par Étienne Gosselin : Jean-Yves Goulet et son gendre, Louis Taillon, font la paire : le premier à la gestion du troupeau et à la logistique, le second à l’alimentation ainsi qu’à la gestion des robots de traite et des champs.

Étienne Gosselin

QUI EST ÉTIENNE GOSSELIN
Étienne collabore au Coopérateur depuis 2007. Agronome et détenteur d’une maîtrise en économie rurale, il œuvre comme pigiste en communication et dans la presse écrite et électronique. Il habite Stanbridge East, dans les Cantons-de-l’Est, où il cultive le raisin de table commercialement.

etiennegosselin@hotmail.com

QUI EST ÉTIENNE GOSSELIN
Étienne collabore au Coopérateur depuis 2007. Agronome et détenteur d’une maîtrise en économie rurale, il œuvre comme pigiste en communication et dans la presse écrite et électronique. Il habite Stanbridge East, dans les Cantons-de-l’Est, où il cultive le raisin de table commercialement.