C’est leur arrière-grand-père qui lança l’aventure, en 1915. Quatre générations plus tard, Joanie Larocque et son frère Alexandre ont repris le flambeau. Toujours avec la race Ayrshire. Et avec grand succès!
En 2020, l’entreprise s’est hautement distinguée grâce à son indice de performance du troupeau (IPT). Avec 968 points (sur 1000), elle s’est classée troisième au Québec et huitième au Canada, d’après les données de Lactanet. L’IPT tient compte de plusieurs points de gestion, tels que la santé du pis, le taux de reproduction, l’âge au premier vêlage, la longévité et les revenus par vache.
De toute évidence, la persévérance récompense. Claude Larocque et Andrée Chicoine, les parents de Joanie et Alexandre, s’étaient établis, eux, en 1981 et avaient mis tout en œuvre pour faire fructifier le bien dont ils avaient la responsabilité. Malgré un succès mérité, les propriétaires de l’entreprise du rang de la Carrière, à Upton (Montérégie), également décorés du titre de Maître-éleveur en 2017, ne se font pas d’illusions. Ils savent pertinemment qu’une reconnaissance se gagne au prix d’efforts et de détermination, et qu’elle se perd parfois rapidement au profit d’autres entreprises tout aussi méritantes. « Il y a une part de hasard et de chance dans chaque réussite; on ne peut pas tout contrôler », dit Claude, qui a commencé à travailler à temps plein dans la ferme familiale à l’âge de 16 ans. En 2019, l’entreprise figurait au 26e rang au Canada pour l’IPT. « D’une année à l’autre, tout peut changer », ajoute-t-il.
« La façon dont ils travaillent va dans le sens de l’IPT, note le technologue Mathieu Campeau, expert-conseil d'Agiska Coopérative. Ils sont rigoureux, proactifs et ils ont l’œil. » Joanie résume ainsi : « On gère tout ce qu’on peut. »
Voir loin dès le premier jour
« Tout d’abord, on s’arrange pour garder la génisse en vie », déclare Claude. « On a des caméras à l’étable, mais il faut être là, ajoute Alexandre. On vérifie par une fouille si le veau est bien placé. » Et Joanie de préciser : « Immédiatement après la mise bas, on lui donne le colostrum, on lui désinfecte le nombril et on le vaccine. Ensuite, on le fait boire trois fois par jour à la main. »
À partir du sevrage, les génisses ont accès à l’extérieur l’été. Elles logent dans une autre étable, située à proximité de la ferme de Mathieu Larocque, l’aîné de la famille, établi sur une terre voisine. À l’âge de 8 mois, on les rapatrie à la ferme, où elles seront saillies à 12 mois. L’âge moyen au vêlage est de 23,4 mois. « On veut qu’elles donnent rapidement le plus de lait possible », explique Alexandre. Joanie ajoute : « C’est assez jeune, on ne veut pas aller plus bas. Il faut qu’elles soient assez grosses, sinon ça peut amener des problèmes. »
L’alimentation – à base d’ensilage de foin mélangé (graminées et légumineuses), d’ensilage de maïs et de foin sec de haute qualité, tous stables et appétents – est aussi au cœur de la gestion de leur troupeau de 150 bêtes, dont 75 sont en lactation. La production de plus de 10 000 kg et une classification moyenne de 85,6 points témoignent de la justesse de leurs décisions d’affaires.
Endettement, optimisation, rentabilité
L’étable à stabulation entravée, bâtie en 1964 et agrandie à deux reprises (en 1996 et en 2012), est très fonctionnelle. « On investit dans ce qui est rentable, signale Alexandre : la ventilation, le bien-être, le confort. On est bien avec nos vieux tracteurs... »
Cela dit, les Larocque ne boudent pas la technologie. En 2018, ils se sont dotés de 12 nouvelles trayeuses sur rail et d’un lactoduc à haut débit. Ils utilisent un système d’autoration, et un robot repousse les aliments vers les vaches. L’entreprise pourra investir lorsqu’il sera nécessaire de grossir. Et il le faudra à moyen terme, croient Alexandre et Joanie.
S’ils savourent les victoires lorsqu’elles passent, ils ne courent pas maladivement après les records de production. « On prend une bière pour célébrer, dit Alexandre. Et quand on se couche, on dort. » Belle philosophie de vie!
Gestion des tâches, du temps et du stress
Joanie se charge de l’alimentation et des champs. Alexandre garde un œil attentif sur la génétique et, depuis le printemps dernier, effectue toutes les inséminations. Il s’occupe également de la gestion de troupeau. Claude leur prête main-forte. Andrée effectue la comptabilité de l’entreprise et de celle de son fils Mathieu, en plus de travailler à l’extérieur. La deuxième fille du couple, Émilie, a choisi un autre parcours professionnel.
On décroche comment? Chacun a droit à une journée de congé par semaine. « Congé de train », précise Joanie. S’il y a urgence, tous répondent présents. Les décisions se prennent au jour le jour, à la tâche, de façon informelle. Les processus sont bien rodés. Pour décompresser, Alexandre joue au soccer, au hockey de terrain (deck hockey) et au hockey sur glace. Joanie a aussi beaucoup pratiqué le soccer. Aujourd’hui, avec ses deux jeunes enfants de sept et cinq ans, elle tient le rôle de soccer mom.
La suite des choses?
Après de tels résultats au chapitre de l’IPT, on vise quoi? « De plus belles vaches, qui vieillissent longtemps, et plus de lait. On continue », conclut Alexandre.