
La période de transition chez la vache laitière, soit entre 21 jours avant le vêlage et 21 jours après, constitue un moment charnière pour chaque lactation. Cette période comporte son lot de stress pour la vache auxquels s’ajoute celui de la chaleur en été.
Certains stress sont nécessaires ou même bénéfiques (libération de cortisol, relaxation des muscles pelviens, etc.), mais, pour la plupart, ils sont à éviter. Beaucoup de recherches ont été effectuées afin de mieux comprendre les besoins alimentaires des vaches en transition et aussi les besoins naturels de ces vaches afin de minimiser le stress lors de cette période cruciale.
La gestion du temps selon les vaches
Bien qu’elles semblent plutôt relax en général, les vaches doivent gérer leur temps dans une journée, leur « budget d’activités ». Elles passeront du temps debout, à boire et à manger, à la salle de traite, à simplement s’aérer en été, et du temps couchées à ruminer. En période de transition, le budget d’activités est fortement perturbé; la consommation de matière sèche est à son plus bas avant de remonter après le vêlage, même chose pour le temps de traite et le temps de couche. À cet égard, il a été démontré (Daniels et al. 2003) que les vaches qui passent plus de temps à se reposer et à ruminer deux à six jours avant le vêlage auront une plus grande consommation de matière sèche ainsi qu’une meilleure production dans les premières semaines de lactation. Pour favoriser ce repos, il faudra donc travailler à minimiser le stress.
Plus récemment, des chercheurs ont voulu comprendre le comportement des vaches en préparation au vêlage, selon diverses options. La Dre Katy Proudfoot a fait le résumé de certaines de ces recherches dans un podcast intéressant. Elle y parle d’études scandinaves et américaines (au Tennessee). On y observait que les vaches, plus spécialement les jeunes vaches, ont tendance à s’isoler lorsque le vêlage approche et à choisir des endroits confortables où l’herbe est haute pour se cacher des prédateurs. Comme dans mon jeune temps, alors que les vaches au pâturage « montaient au bois » au moment de vêler!
De nos jours, la grande majorité des vaches au Canada ne vêlent pas au pâturage, alors peut-on reproduire un environnement qui va favoriser le comportement naturel des vaches dans nos étables?
Des essais sur la densité des enclos et le comportement des vaches
À l’Université de la Colombie-Britannique (UBC), on a construit un box fermé dans un parc pour les vêlages et observé le comportement des vaches selon qu’elles étaient seules dans le parc ou bien appariées (deux par parc). Les vaches seules avaient tendance à aller vêler dans le parc, surtout quand le processus se déclenchait le jour. Le comportement changeait lorsque les vaches étaient appariées. On peut penser que le comportement est altéré par l’effet de dominance d’une vache sur l’autre, et donc que la dominée sera « chassée » de l’enclos par l’autre. Dans un autre essai, toujours à la UBC, les vaches proches du vêlage étaient mises dans un enclos fermé en grande partie, sauf pour la barrière d’entrée. Dans cette situation, les vaches ont eu tendance à se placer dans l’endroit caché plutôt que vis-à-vis de la « fenêtre » de la barrière. Plus récemment, au Miner Institute, la Dre Heather Dann a fait une expérience dans un enclos de vêlage en ajoutant un simple muret en ciment surmonté de planches de bois à hauteur d’environ 1,5 mètre. L’expérience a été conduite dans deux conditions différentes : un enclos à forte densité (9,2 mètres carrés par vache) et un autre à faible densité (20,4 mètres carrés par vache).
Les schémas 1 et 2 montrent les endroits privilégiés par les vaches pour mettre bas. Dans les deux cas où il y avait un muret, la proportion des vêlages près de ce muret a été plus élevée. En l’absence de muret, les vaches ont choisi les endroits où il y avait le moins de circulation, loin des barrières.
Que peut-on conclure de tout ça? En fait, on doit comprendre que les vaches vont changer de comportement selon l’environnement dans lequel elles se trouvent. Selon les observations énumérées plus haut, plusieurs vaches vont utiliser un endroit isolé si elles y ont accès.
L’interaction avec les autres vaches (le rapport dominée-dominante) est aussi importante. Il faut garder cela en tête lors de la construction d’une nouvelle étable ou d’un agrandissement pour loger les vaches taries et en transition (ce qui souvent s’avère un très bon investissement), et même tout simplement pour améliorer les installations existantes, par l’ajout d’un muret, par exemple.
Bien d’autres facteurs de stress peuvent affecter les rendements ou la santé des vaches en transition, il ne faut pas les oublier. Les plus importants : la durée du temps passé dans un enclos avec les mêmes congénères (des séjours plus longs permettent une meilleure acclimatation, si on peut garder le même petit groupe de vaches durant tout le tarissement), la différence de parité (dominance), le déplacement entre les enclos, le surpeuplement et le stress de chaleur.
Un environnement calme, bien ventilé, avec des endroits pour s’isoler, c’est déjà un bon début!
Photo d'en-tête : Sollio Agriculture