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Vétérinaire pour grands animaux, une espèce menacée

Photo : Gracieuseté de l’AMVPQ (crédit : Marco Langlois)

Le problème est connu depuis plusieurs années : la relève se fait rare chez les vétérinaires pour grands animaux, et la pénurie est une menace de plus en plus préoccupante.

Rosalie Thiffault décrochera son diplôme dans trois ans, mais son choix est déjà fait; elle pratiquera dans le secteur bovin, dans le laitier plus précisément. « Je n’avais jamais vu de vaches de ma vie d’aussi près avant mon entrée à la Faculté de médecine vétérinaire, raconte la jeune femme originaire de Shawinigan. Après mon stage d’été avec une vétérinaire et dans une ferme, j’ai eu un véritable coup de cœur et j’ai développé une passion pour les vaches laitières. C’est dans ce secteur que je veux travailler quand je vais terminer mes études. »

Rosalie fait partie des quelques étudiants de sa cohorte qui choisiront de pratiquer auprès des grands animaux, alors que la majorité se dirigera vers les soins des animaux de compagnie ou vers des secteurs liés à la santé publique, la recherche et l’enseignement. 

 

Une pratique en transformation

Il s’agit d’un retournement de situation par rapport à il y a une trentaine d’années. Si, dans les années 1980, le secteur des grands animaux attirait bon an mal an de nombreux jeunes vétérinaires, la pratique n’a plus le lustre qu’elle a déjà eu. Et le phénomène n’est pas particulier au Québec. Dans le reste du Canada, aux États-Unis et en Europe, on parle de plus en plus de pénurie et, au bout du compte, d’une rupture dans la capacité de donner des soins.

Au Québec, bon nombre de cliniques vétérinaires peinent à recruter pour les grands animaux, et les facteurs en jeu ressemblent, sous plusieurs aspects, à la pénurie de médecins pour les humains. Par exemple, le recrutement est plus difficile en région. Dans bien des cas, des campagnes de séduction sont mises en place pour attirer les vétérinaires et leurs conjoints.

Le Dr Jean-Yves Perreault, médecin vétérinaire à Notre-Dame-du-Bon-Conseil et président de l’Association des médecins vétérinaires praticiens du Québec (AMVPQ), reconnaît que le métier ne s’exerce plus comme à ses débuts. « Pour les gens de ma génération, le travail prenait beaucoup de place, c’était un gros temps plein. »

Sans parler de pénurie, le Dr Perreault indique que des secteurs sont plus fragiles et que la situation est sérieuse à bien des endroits. « Il n’y a pas d’interruption de services, mais les cliniques sont tenues à bout de bras par les vétérinaires, entre autres grâce à la collaboration qui existe entre l’AMVPQ, le MAPAQ [ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec] et l’UPA [Union des producteurs agricoles]. L’âge moyen des vétérinaires dans le secteur des grands animaux augmente, et bon nombre prendront leur retraite dans quelques années. Il y a risque de pénurie à court terme. »

 

Les causes sous la loupe

Bien que d’apparence simple, le problème de la pénurie de vétérinaires pour grands animaux a des racines complexes. Aux désirs d’une génération plus jeune, comme cela est évoqué plus haut, se mêlent d’autres aspects.

Le premier est le vieillissement des vétérinaires. Ce fait est plus marqué en région et dans le secteur bioalimentaire, où une majorité des professionnels ont plus de 50 ans.

On pourrait songer que la féminisation de la profession expliquerait un certain désintéressement, en raison du travail plus physique. En ce moment, la proportion dans le secteur des grands animaux est de 40 % de femmes vétérinaires sur les 444 membres que compte l’AMVPQ, une proportion qui devrait passer aux deux-tiers dans les prochaines années.

Le changement de génération a aussi nécessité que les cliniques modifient leurs habitudes. Les longues soirées de garde sont moins bien acceptées, à moins qu'une plus grande rotation de personnel soit possible - ce qui requiert que les cliniques s'agrandissent, tout en offrant le même niveau de service.

 

En mode solution

Une solution facile à la pénurie serait de former plus de vétérinaires. En ce moment, 96 candidatures sont retenues chaque année sur les quelque 1 000 reçues par la Faculté. La formation d’un plus grand nombre de candidats par an est toutefois impraticable pour plusieurs raisons. « La Faculté a une capacité limitée d’accueillir des étudiants en raison de ses infrastructures, souligne la doyenne. Il faut aussi faire attention aux stratégies mises en place. On ne peut pas garantir que ces finissants se dirigeraient en soins pour la production animale. »

Pour leur part, les moyens de l’OMVQ sont limités. « L’Ordre n’a aucun pouvoir sur où  les vétérinaires s’installent, ni sur le choix de leurs secteurs de pratique (animaux de compagnie ou de production) »,  dit la Dre Kilsdonk, présidente de l’Ordre des médecins vétérinaires du Québec (OMVQ). Les moyens sont en amont. »

 

Lire l’article complet dans l’édition de septembre 2019 du Coopérateur.

Céline Normandin

QUI EST CÉLINE NORMANDIN
Détentrice d’une maîtrise en science politique, Céline est journaliste-pigiste auprès du Coopérateur. Et ce n’est pas par hasard si elle se retrouve aujourd’hui à couvrir le secteur agroalimentaire puisqu’elle a grandi sur une ferme laitière. Sa famille est d’ailleurs toujours active en agriculture. 

celine.normandin@videotron.ca

QUI EST CÉLINE NORMANDIN
Détentrice d’une maîtrise en science politique, Céline est journaliste-pigiste auprès du Coopérateur. Et ce n’est pas par hasard si elle se retrouve aujourd’hui à couvrir le secteur agroalimentaire puisqu’elle a grandi sur une ferme laitière. Sa famille est d’ailleurs toujours active en agriculture.