La situation est inquiétante et la prudence est de mise, déclare Costanza Galeano, experte-conseil chez Sollio Agriculture.
Le virus de la grippe aviaire H5N1 continue de se propager au Québec. Selon l’Équipe québécoise de contrôle des maladies avicoles (EQCMA), il y a présentement, en date du 22 octobre, quatre zones de contrôle primaire (ZCP) commerciales en vigueur: une à Saint-Jacques-le-mineur, deux dans la région de Saint-Alfonse-de-Granby et une nouvelle à Princeville-Victoriaville. On compte également une ZCP non commerciale à Saint-Philippe de La Prairie. À Valcartier, il reste encore deux zones de sécurité. Toujours selon l’EQCMA, il est prévu dans cette région que les dernières zones soient levées le 1er novembre prochain.
Du 26 septembre au 22 octobre dernier, 47 nouveaux cas (24 troupeaux commerciaux et 23 petits élevages) ont été déclarés dans toutes les provinces canadiennes, y compris le Québec où 13 élevages commerciaux et 5 petits élevages ont été touchés, pour un total de 18 cas confirmés.
Le Québec connaît une situation sans précédent, relate Costanza Galeano, experte-conseil du secteur avicole chez Sollio Agriculture. « Le virus a d’abord affecté des productions non contingentées, comme le canard et de petits élevages, mais ces productions se trouvaient alors plus isolées, rappelle la spécialiste. Avec ce qu’on observe ailleurs en Montérégie, l’inquiétude monte d’un cran. Il y a de nombreux poulaillers et une forte densité de volailles dans cette région. »
Un virus hautement pathogène
Le virus en circulation, le H5N1, est hautement pathogène et mortel pour les oiseaux, d’où les mesures sévères prises pour le contrôler. « Le virus auquel on fait face peut causer un taux de mortalité de 20 à 30 % en deux à trois jours, explique l'experte-conseil. Les oiseaux des élevages touchés sont euthanasiés et compostés, et un vide sanitaire est appliqué. »
Rappelons que le virus H5N1 hautement pathogène a été transporté par les oiseaux migrateurs au printemps dernier. Plusieurs espèces ont été affectées et des cas ont été rapportés un peu partout dans la province. Une accalmie était anticipée avec l’été, mais contrairement aux attentes, des cas ont continué d’être recensés, indique Mme Galeano.
La recrudescence des cas actuels est liée au même phénomène, soit la migration des oiseaux sauvages vers le sud, dont certains sont contaminés. Interrogée à savoir si le pire est derrière nous, Costanza Galeano hésite. « C’est difficile à dire, répond-elle. On pourrait dire que le risque devrait être réduit dans trois à quatre semaines avec l’arrivée de la neige, mais des oiseaux restent maintenant sur place tout l’hiver. Selon certaines études, le virus se transmettrait même à plusieurs types de mammifères, ce qui maintient le virus vivant. »
C’est donc à dire que la situation actuelle est du jamais vu, selon l’experte. « On n’est pas capable de dire comment ce sera cet hiver. On est dans l’inconnu. (…) Le virus nous réserve encore des surprises. »
Le milieu est hautement mobilisé dans sa lutte contre le virus, souligne Costanza Galeano. Tous les efforts, dans chacun des maillons de la chaîne de valeur, des couvoirs aux abattoirs, en passant par les meuniers et les producteurs, sont déployés avec rigueur pour combler les arrêts de production et l’approvisionnement des marchés afin que les produits se retrouvent, sans ruptures, chez les consommateurs. L’engagement de l’industrie pour se sortir de cette situation est entier, appuie l’experte-conseil.
La biosécurité comme rempart au virus
Aucun traitement n’existe actuellement pour traiter le H5N1 dans la volaille, confirme l'experte-conseil, même si la recherche avance rapidement dans ce domaine. Ainsi, en l’absence de traitements, la prévention est le seul outil disponible. Les mesures de biosécurité doivent être appliquées à la lettre, telles que la désinfection, et les visites limitées aux fermes. Tous les contacts potentiels avec les oiseaux sauvages doivent être proscrits, ce qui veut dire aussi les activités de chasse ou récréatives qui pourraient nous placer en situation de proximité, note la spécialiste. En cette période de récolte, une attention particulière devrait être apportée à la machinerie à l’œuvre dans les champs.
« Les producteurs agricoles peuvent contacter le MAPAQ et l’ACIA si des oiseaux sauvages morts sont découverts dans leurs champs ou près de leurs bâtiments de ferme, rappelle Costanza Galeano. Les laboratoires sont équipés en ce moment pour livrer des diagnostics rapides. Plus les intervenants seront informés de la circulation du virus, plus ils pourront agir en mode prévention. »
(Photo par Étienne Gosselin)