
Le sujet qui bouscule toutes les régions du Québec n’a pas épargné la région de l’Abitibi-Témiscamingue, poussée dans ces derniers retranchements par des feux de forêt durant les premières semaines de juin 2023. Quelque 1085 vaches, veaux, taureaux, quelques porcs et des poules ont été obligés de déménager en urgence.
La Sécurité publique a ordonné l’évacuation des habitants de Normétal, Saint-Lambert et Val-Paradis au début du mois. Les municipalités de La Reine et Dupuy étaient quant à elle en pré-évacuation et certains producteurs ont décidé d’évacuer. Les agriculteurs devaient quitter leurs résidences avec ou sans les animaux. Leur choix a été clair : les animaux suivaient leurs propriétaires.
Un grand élan de solidarité
C’est à ce moment qu’un grand esprit de solidarité s’est manifesté dans la communauté agricole abitibienne. « Les producteurs ont tous voulu aider », souligne l’expert-conseil et lauréat du prix de bienveillance 2021 de Sollio Agriculture, Vincent Chrétien. Les gens touchés ont eu l’aide de transporteurs, de gens qui avaient des pâturages libres, des gens qui avaient des bâtiments disponibles.
De concert avec l’UPA (Union des producteurs agricoles), tous les animaux ont été déplacés dans un temps record. « Je crois que 48 heures ont suffi. Tous les gens ont levé la main pour apporter leur aide », explique Vincent Chrétien, qui a lui-même offert d’héberger les animaux d’un de ses clients, Marco Lévesque, qui exploite une ferme avec son épouse Danielle Audet. Novago Coopérative a offert des lunchs aux équipes de bénévoles afin de leur enlever cette tâche et leur permettre de se concentrer sur les efforts pour venir en aide aux éleveurs touchés.
Le représentant de Novago a été témoin d’un grand esprit de solidarité. « C’était très impressionnant. Tous les gens se sont serré les coudes et nous avons pris les choses en main. Parmi les nombreux bénévoles qui ont apporté leur soutien à leurs pairs, il y avait Transport Jean-François Breton, la Ferme Roger Bordeleau, qui a prêté son camion-remorque, Patrick Jalbert de la Ferme Sybert, des clients de Novago en plus de Mathieu Dumont et Audrey Drouin de la Ferme SG Noël. Ces derniers ont coordonné le transport des bovins lors de leurs deux transports (l’aller et le retour). »
Au cours de ce véritable combat contre les éléments, Vincent Chrétien a senti une grande émotivité marquer les gens. « Une fois que les animaux sont en sécurité c’est super, mais de partir avec le stress de ne pas savoir si ta maison va y passer ou ta ferme, c’est émotif. Il y a beaucoup d’inconnu là-dedans. Le feu va-t-il arrêter? Les précipitations, il n’y en a pas beaucoup chez nous. Les gens de la SOPFEU et les pompiers volontaires ont travaillé fort », admire Vincent Chrétien.
Cellule de crise et coordination
Les images de la télévision des flammes qui rugissaient étaient impressionnantes. Les personnes impactées ont reçu l’appui des gens de l’UPA et du MAPAQ. Le travail de coordination a été gigantesque. « Je pense que nous n’avons jamais vu un truc pareil, expose le responsable des communications de l’UPA de l’Abitibi-Témiscamingue David Prince. Il nous a fallu agir rapidement, car le feu près de Normétal a progressé rapidement. Nous nous sommes réunis le vendredi et le samedi, et les évacuations ont débuté. Ça s’est poursuivi le dimanche, le lundi et le mardi. Nous avions créé une cellule de crise avec le MAPAQ. Leur directrice régionale, Anick Lavoie, nous apportait les informations et nous la retransmettions aux producteurs touchés. »
Au total, les propriétaires de sept entreprises agricoles ont été obligées de quitter précipitamment leurs emplacements pour fuir le danger. « Nous devions trouver des endroits ou loger les animaux et des transporteurs. Ç’a très bien été de ce côté-là. Les gens se sont vraiment bien impliqués », indique M. Prince à l’instar de Vincent Chrétien.
En plus des producteurs de vaches-veaux, plusieurs entreprises de moins grandes envergures ont pu bénéficier de l’aide des gens chapeautés par l’UPA. « Il y avait quelques porcs et passablement de poules. Aucun producteur laitier n’a été touché, mais l’équipe était prête, souligne David Prince. Un seul producteur de lait était près de la zone d’évacuation. Si nous avions été obligés de l’évacuer, parce que nous ne savions pas jusqu'où ça irait, ça aurait été plus compliqué de trouver un site de réception. Mais les Producteurs de lait de l’Abitibi-Témiscamingue étaient prêts à cette éventualité. »
Finalement, aucune personne, aucun animal, ni aucun bâtiment n’ont subi de blessure ou de dégâts matériels. Pour David Prince, le mérite revient à la SOPFEU qui a accompli un excellent boulot.
Photos de Vincent Chrétien