Le 1er janvier 2017, Tommy Chénard et sa conjointe Myriam Côté sont devenus les propriétaires de la Ferme Jendro de Rimouski, une ferme laitière qui produisait un quota de 92 kg de matières grasses par jour, qui a aujourd’hui grimpé à 141,2 kg avec le même nombre de vaches en lactation, soit 96.
Tommy Chénard a grandi dans une ferme laitière au Bic : la Ferme Hâtée. Comme il n’était pas la relève identifiée de l’entreprise, il était à la recherche d’une entreprise à acheter. « Je travaillais à la ferme familiale depuis quatre ans et on surveillait les occasions pour que je puisse m’établir avec Myriam qui voulait elle aussi s’impliquer dans une ferme laitière. J’ai entendu dire que la Ferme Jendro était à vendre à l’automne 2016. Je suis venu rencontrer les propriétaires immédiatement. Ils étaient prêts à vendre parce qu’ils n’avaient pas de relève », raconte Tommy.
La passion de l’agriculture
Myriam Côté a fait son chemin dans le domaine de l’agriculture. « J’ai étudié en agronomie à l’Université Laval avant de travailler trois ans pour Holstein Québec. Ça m’a permis d’élargir mon réseau de contacts. Je travaillais dans la vulgarisation et dans l’organisation d’activités pour les jeunes. C’est un domaine qui m’a toujours intéressé », dit-elle.
Tommy possède un DEC en production animale de l’ITAQ de La Pocatière. Il a fait des stages au Québec, en Ontario, dans l’Ouest canadien et en Suisse dans des milieux assez diversifiés, ce qui lui a permis de voir ce qui se faisait ailleurs et d’élargir ses horizons. À sa sortie de l’ITAQ, il a classifié pendant un an pour Holstein Canada.
Le couple a mis en commun ses expériences pour faire progresser son entreprise dans un contexte pas facile marqué par trois étés de sécheresses, la pandémie de COVID-19 et l’inflation.
Une bonne base de troupeau
Le troupeau Jendro avait de bonnes familles de vaches Holstein pur-sang, mais il restait quand même pas mal de détails à peaufiner pour exploiter l’entreprise à son plein potentiel. « Mon frère [Jérôme] nous a aidés à améliorer notre génétique en nous fournissant des embryons provenant de la ferme familiale. Cela nous a donné de bons sujets. On travaille ensemble, mais nous voulions avoir chacun notre entreprise », poursuit Tommy.
Aujourd’hui, l’entreprise compte le même nombre de vaches en lactation (96), mais la production a grimpé en flèche. « Les premières années, nous avons misé tous les mois pour acheter du quota. Nous avons retravaillé les stales. Nous avons amélioré le confort des vaches avec des matelas et des chaînes au lieu des tuyaux à l’avant des vaches, mais sans faire de grosses modifications. Nous avons essayé d’améliorer ce qu’on avait », expliquent les propriétaires.
Une meilleure régie de troupeau
Dès leur arrivée, Tommy et Myriam se sont affairés à travailler sur la régie du troupeau. L’objectif est d’améliorer la moyenne de production. « Au début, le but était d’avoir le plus de vêlages possible. On ne fait pas de transplantation embryonnaire. Je fais les meilleurs croisements de taureaux possibles. Nous avons aussi acheté des animaux en copropriété avec mon frère pour améliorer la génétique du troupeau. En divisant les coûts en deux, ça nous permet d’aller chercher des animaux plus chers », souligne Tommy.
Un troupeau de 220 têtes
Le troupeau compte 220 têtes au total. Les vaches en lactation et en préparation au vêlage sont attachées tandis que les vaches taries sont en stabulation libre. La classification est de six excellentes, 59 très bonnes, 52 bonnes plus et deux bonnes.
« Nous avons augmenté le nombre de vêlages par mois. Nous sommes agressifs sur les saillies après le vêlage. À 55 jours après le vêlage, si nous n’avons pas vu de chaleur, les vaches se font poser un CIDR (dispositif intravaginal à libération de progestérone). Myriam est une très bonne observatrice. Nous faisons des visites de vétérinaire serrées. L’objectif ultime, c’est d’avoir le plus de vêlages possible au plus jeune âge ».
Pas de plan d’agrandissement
Myriam indique qu’il n’y a pas de plan d’agrandissement pour le moment. En plus des deux propriétaires, l’entreprise compte un employé à temps plein et deux autres pour la période estivale. « Depuis un an, nous avons un employé guatémaltèque à l’année et, cet été, nous en avons ajouté un deuxième à la place d’employés à temps partiel et de stagiaires que nous avions l’habitude d’engager. Ça nous donne plus de stabilité. Avec des étudiants, on se retrouvait souvent seuls les fins de semaine. »
De plus en plus, l’entreprise fusionne le parc de machinerie avec la Ferme Hâtée du frère de Tommy. « Tous les chantiers de récolte sont faits conjointement. Nous mettons en collaboration les ressources humaines des deux entreprises. Lorsque nous devons faire l’achat d’un équipement, ça divise les coûts. Nous avons deux troupeaux qui ont sensiblement la même grosseur et deux entreprises qui ont des superficies semblables en culture. Nos positions géographiques différentes font que son foin est à maturité avant le mien. Même chose pour le maïs et les céréales », affirme Tommy.
Est-ce un besoin essentiel?
Avant de faire un investissement, le couple de propriétaires de la Ferme Jendro se demande toujours si c’est vraiment nécessaire.
Cette année, la Ferme Jendro a semé des céréales pour la première fois depuis trois ans, une douzaine d’hectares (une trentaine d’acres) de seigle en plus de 40 hectares (100 acres) d’ensilage de maïs, sur un total de 267 hectares (660 acres) en culture. Après trois années de sécheresse, la réserve de fourrages était à son plus bas et le maïs correspondait mieux aux besoins puisque c’est une plante qui répond bien au manque d’eau. « Nous avons acheté beaucoup de foin de l’extérieur. C’est plus facile d’acheter du grain que du foin. C’est pour ça que nous avions arrêté de faire des céréales », explique Myriam.
L’objectif des propriétaires est d’augmenter l’efficacité autant dans l’étable que dans les champs. « Avec Pierre-Marc [Cantin, expert-conseil grandes cultures et ruminants au Centre de services de l’Est], on essaie d’avoir la ration la plus économique possible, sans couper dans la ration ou diminuer la production », mentionne Tommy.
Pour Pierre-Marc Cantin, le nerf de la guerre pour réussir en production laitière, c’est de faire le plus de lait possible avec le moins de vaches et c’est ce que les propriétaires de la Ferme Jendro visent. « Ça coûte le même prix pour garder une vache qui produit 25 kg de lait qu’une autre qui en produit 55. Toutes les décisions prises ici sont réfléchies et non pas prises sur un coup de tête. C’est ce qui explique les résultats obtenus », affirme-t-il.
Des propriétaires complémentaires
Tommy et Myriam se complètent bien. Myriam s’occupe de la régie du troupeau. « Elle s’occupe des veaux, de la surveillance et de la détection des chaleurs. Nous avons du succès parce que les injections sont faites au bon moment. Moi, je m’occupe de la génétique, de la sélection des taureaux. Myriam fait plus de traite que moi », mentionne celui qui gère aussi les champs et la machinerie. Le couple a deux filles : Laura, 5 ans, et Jeanne, 3 ans.
Une championne
Jendro Delta Lambda Sandy TB 2 ans a été vendue sur le terrain de l’Expo agricole de Rimouski avant le jugement où elle a reçu le titre de Grande Championne de Réserve, puis consignée dans la vente East Coast Style, dans les Maritimes. « Elle a très bien performé lors des jugements auxquels elle a participé et a permis de faire connaître notre élevage partout au Canada. Nous sommes très fiers d’avoir élevé une vache telle que Sandy », commentent Myriam et Tommy. Sandy a aussi reçu le titre de Championne Suprême au Atlantic Summer Classic 2023, à l’Île-du-Prince-Édouard.
Une génisse de la Ferme Jendro s’est aussi démarquée lors de la saison 2023. Jendro Alpha Emotion s’est classée au deuxième rang dans la catégorie Génisse printemps à l’Expo de Rimouski et au troisième rang de la catégorie Génisse printemps au Suprême Laitier Holstein. L’entreprise a aussi reçu une grande distinction pour la qualité de son lait.
Photo de Patric Nadeau