
La croissance rapide du fœtus et la mise en place de la mécanique de synthèse du lait provoquent des stress métaboliques importants chez la vache en transition et augmentent de beaucoup ses besoins nutritionnels. Comme on a abondamment discuté d’énergie en transition, nous nous concentrerons sur le volet protéine.
Les réserves de protéine ou d’acides aminés disponibles chez une vache sont très limitées. La vache en transition se retrouve donc en bilan protéique négatif très rapidement après le vêlage et parfois même avant.
Besoins avant le vêlage
Les besoins en protéine et en acides aminés métabolisables (donc digestibles) de la vache en fin de gestation sont encore mal définis.
En attendant que les études comblent ces lacunes, on ne doit pas nécessairement adopter la stratégie « plus de protéine peu importe le profil d’acides aminés, c’est mieux! » Essayer de compenser un manque de données par un surplus de protéine n’est pas toujours la meilleure solution du point de vue de la production.
Une méta-analyse d’un chercheur australien regroupant les résultats de 11 études et de 26 comparaisons, ainsi que des rations témoins allant de 9,7 à 14,1 % de protéine comparativement à des rations tests de 11,7 à 23,4 % de protéine, a conclu que l’augmentation de la teneur en protéine brute des rations en préparation n’était pas gage d’une augmentation de production de lait.
Alors, est-ce à dire que 9 %, c’est suffisant? Non. Ces résultats démontrent que le fait de ne regarder que la protéine brute n’est pas suffisant, puisque ce critère ne nous donne aucune indication de la disponibilité de cette protéine ou de son profil d’acides aminés. Choisir seulement les critères de production comme paramètre n’est pas suffisant non plus, puisque cela n’évalue pas l’impact sur les réserves d’acides aminés, ni sur la santé, ni sur les performances de reproduction.
Il faut aller au moins une étape plus loin et regarder la protéine métabolisable (donc absorbable, PM) qu’apporte la ration. Une deuxième méta-analyse de chercheurs de l’Université de la Floride (Husnain et Santos) regroupant 27 études, dont 8 ayant comparé les résultats des primipares séparément, a démontré une augmentation des performances laitières et de la consommation chez les primipares lorsque l’apport de PM passe de 510 à 1100 g/j : gain de 2 kg de lait corrigé. Cette même étude a aussi évalué l’impact du pourcentage de protéine brute de la ration et n’a pu déceler aucun lien entre ce critère et les paramètres de production laitière.
Serait-il avantageux d’offrir plus de 1100 g de PM pour les premières lactations? On ne peut répondre à partir de cette étude. Pour les deuxièmes lactations et plus, la plage de PM étudiée était plus large, allant de 460 à 1733 g/j, et le seul impact positif observé sur la production fut une augmentation de 0,02 kg de protéine laitière chez les vaches multipares produisant plus de 36 kg de lait et consommant 1200 g de PM au lieu de 900 g. Peu importe la parité, une augmentation de la PM de 800 à 1000 g/j chez les primipares et de 900 à 1200 g/j chez les multipares a amélioré la condition de chair des vaches post-vêlage. On peut supposer qu’une meilleure condition de chair sans réduction de production, et même avec des augmentations, chez les primipares peut être liée à un meilleur bilan protéique pré ou post-vêlage.
Comment appliquer sur le terrain
Quand vient le temps de mettre cela en pratique, il ne faut pas oublier que la consommation de matière sèche à l’approche du vêlage est très variable. Certains chercheurs suggèrent donc de viser 1200 à 1300 g de PM, surtout lorsqu’on a des groupes de vaches de parité et de poids différents, pour s’assurer que les besoins de la majorité des animaux seront comblés.
Comment traduire cela en protéine brute? Bill Weiss, de l’Université de l’Ohio, suggère une concentration de 15 % de protéine brute de qualité pour les premiers veaux, et si on a des groupes mélangés, alors 13-14 % d’une protéine de qualité devrait bien travailler lorsque la consommation est au rendez-vous. Il faut se souvenir également qu’une bonne fraction de la PM provient de la synthèse protéique des microbes du rumen. Donc, même si on vise à éviter les excès d’énergie avant le vêlage, il est à mon avis important de maintenir une certaine fermentescibilité de ration durant ces semaines pour garantir une synthèse de protéine microbienne et un apport d’acides aminés métabolisables de qualité pour la vache.
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