
Selon le rapport Valeur des terres agricoles de Financement agricole Canada (FAC), le Canada a enregistré une hausse moyenne nationale de 8,3 % en 2021. La valeur des terres agricoles a augmenté malgré les répercussions des perturbations de la chaîne d’approvisionnement causées par la pandémie et les conditions météorologiques défavorables qui ont affligé certaines parties du pays.
En comparaison, FAC a fait état d’une hausse moyenne nationale de 5,4 % en 2020 et de 5,2 % en 2019.
Au Québec, la valeur moyenne des terres agricoles a augmenté de 10 % en 2021, après avoir progressé de 7,3 % en 2020 et de 6,4 % en 2019. Outre le Québec, c’est en Ontario (22,2 %), en Colombie-Britannique (18,1 %), à l’Île-du-Prince-Édouard (15,2 %) et en Nouvelle-Écosse (12,3 %) que les hausses les plus marquées ont été enregistrées.
De toutes les provinces, l’Ontario est celle qui a connu une véritable flambée, ayant plus que quadruplé la hausse moyenne de la valeur des terres agricoles enregistrée en 2020, soit 4,7 %. La Colombie-Britannique, pour sa part, a doublé la hausse moyenne de l’année précédente.
Jean-Philippe Gervais, économiste en chef de Financement agricole Canada, n’est pas surpris d’assister à ces hausses qui, dans l’ensemble du Canada, ont même pris un peu de vitesse, contrastant avec les trois années précédentes alors qu’on avait commencé à voir un certain ralentissement du rythme d’augmentation. « Il y a des facteurs communs à toutes les provinces, dit-il. La faiblesse des taux d’intérêt, les prix élevés des cultures et produits de base et, dans plusieurs régions, l’offre limitée de terres et une demande forte des entreprises qui veulent prendre de l’expansion en raison de perspectives de croissance intéressantes. La combinaison de ces facteurs a poussé la valeur des terres à la hausse et semble avoir atténué une partie des nombreuses difficultés qui auraient pu restreindre la demande de terres agricoles et faire baisser le prix que les producteurs sont prêts à payer pour ces terres. »
« Dans le reste du Canada, on a eu plusieurs défis, ajoute Jean-Philippe Gervais. Entre autres, la sécheresse intense qui a frappé les prairies canadiennes. Cela dit, les sécheresses dans l’ouest, du moins pour le moment, ne semblent pas indiquer un ralentissement pour la demande de terres. Et, somme toute, si on regarde les recettes agricoles en grandes cultures à l’échelle du pays, elles ont augmenté de 10,7 % en moyenne. Des recettes à la hausse poussent également la demande à la hausse. »
Au Québec, en 2021, les recettes en grandes cultures ont augmenté de 12,1 %, souligne l’économiste en chef. « L’année dernière, le prix des terres était déjà assez élevé par rapport à leurs valeurs productives, dit-il. C’est-à-dire qu’avec un rendement moyen pour un hectare avec des prix moyens, on était proche d’un maximum, ou à tout le moins au niveau le plus haut historiquement. Si les prix des terres au Québec ont augmenté de 10 % et que les revenus ont augmenté de 12,1 %, en gros, le prix de la terre a suivi les revenus. »
Ailleurs au pays, les hausses ont été plus modestes : 3,6 % en Alberta, 5,2 % au Nouveau-Brunswick, 7,4 % en Saskatchewan et 9,9 % au Manitoba. Le nombre de transactions rendues publiques à Terre-Neuve-et-Labrador était insuffisant pour évaluer pleinement la valeur des terres agricoles dans cette province.
M. Gervais souligne également que l’incertitude continue de planer sur l’industrie agricole canadienne en raison des pénuries de main-d’œuvre, des changements climatiques, des perturbations de la chaîne d’approvisionnement, des tensions géopolitiques, de la montée des prix des intrants agricoles et des hausses graduelles de taux d’intérêt qui sont attendues cette année.
Parallèlement, FAC prévoit que la demande vigoureuse et les stocks mondiaux restreints entraîneront une augmentation des recettes pour les céréales, les oléagineux et les légumineuses au Canada en 2022.
Dans ce contexte de volatilité, il rappelle aux producteurs agricoles l’importance d’avoir un rigoureux plan de gestion du risque qui tient compte des changements économiques possibles, en s’assurant d’avoir un budget laissant une marge de manœuvre, en cas de fluctuation du prix des produits agricoles, des rendements ou des taux d’intérêt. Ils doivent faire preuve de prudence, en particulier dans les régions où le taux de croissance de la valeur des terres agricoles a dépassé celui de revenu agricole au cours des dernières années.
Par contre, ajoute-t-il, quand ces achats de terre s’insèrent dans un plan stratégique de développement, historiquement ç’a été une formule qui a porté ses fruits en contribuant à bâtir de l’équité à l’intérieur de l’entreprise. Mais c’est évident que le taux de croissance de la valeur des terres est rendu à un point où leurs prix relativement à leurs revenus reste à son plus haut niveau, et qu’il faut tenir compte que les prix des cultures vont inévitablement redescendre, tient-il à rappeler. Donc tout ceci est à considérer dans un plan de croissance, de gestion de l’entreprise et de gestion des risques.