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Chroniques / Faits et gestes

Et retombe la poussière

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Voilà déjà plus de trois mois que les ministres du Commerce des pays membres du Partenariat transpacifique (PTP) sont parvenus à un accord au petit matin, dans un hôtel du centre-ville d’Atlanta. On sera nombreux à se rappeler ce qu’on faisait en apprenant la nouvelle ce matin-là.

Des observateurs externes à l’industrie agroalimentaire se sont demandé pourquoi on a si peu parlé de l’importance capitale du PTP pour les secteurs porcin et bovin dans les jours précédant sa conclusion. Ces secteurs auraient sévèrement pâti de la perte d’un accès concurrentiel à des marchés cruciaux. Or ils n’ont jamais été à risque, puisque l’éventualité d’un PTP sans Canada n’a jamais été évoquée. On a parlé de la gestion de l’offre, toutefois. Pendant que son avenir se jouait peut-être à huis clos à Atlanta, on faisait son procès en sol canadien. En même temps, au sein de la communauté laitière, l’impact du PTP imminent est des plus évident. Couplé à la baisse du prix du lait de la dernière année, tout le buzz entourant le PTP mène à une hausse substantielle – qui s’avèrera momentanée – de l’offre de quota.

Et retombe la poussière. Un constat s’impose : la pression qui s’exerçait sur notre marché laitier était si forte que les 3,25 % ont de paradoxales allures de victoire. Il faut saluer les efforts titanesques déployés par les négociateurs canadiens pour résister à la pression des envahisseurs : la Nouvelle-Zélande et les États-Unis. La frustration ouvertement manifestée par le ministre néo-zélandais du Commerce à la suite du PTP en dit long.

Malgré le resserrement inévitable, une proportion impressionnante d’entrepreneurs laitiers affirment leur volonté de croissance. Ils expriment cette confiance en l’avenir en toute conscience de la relative précarité de la protection frontalière quant aux produits innovants qui entrent dans la fabrication de produits laitiers. On se fait à l’idée : l’impact sur le prix du lait, et conséquemment sur les marges, est structurel. « S’il avait été si facile de fermer la frontière au lait diafiltré, pourquoi est-ce que ça n’a pas été fait le 5 octobre, par un gouvernement conservateur alors en situation électorale périlleuse? » philosophent certains. Une nouvelle conclusion s’impose : les 3,25 % sont un autre caillou dans le soulier, certes. Mais leur poids est relatif en regard de l’enjeu des ingrédients. La filière laitière canadienne trime dur pour s’adapter à des avancées technologiques qui, par définition, se poursuivront.

La prudence s’impose à ceux qui, s’appuyant sur les nébuleuses déclarations de Hillary Clinton, seraient tentés de croire que le PTP pourrait ne pas être ratifié. Mme Clinton sera candidate démocrate à la présidence. À plus forte raison si les républicains lui font le cadeau de lui opposer l’inqualifiable Donald Trump, elle sera dans un an la première présidente des États-Unis. Quoi qu’elle dise présentement sur le PTP, elle travaillera ultimement en faveur de sa ratification. Un réputé analyste du secteur agroalimentaire québécois (il se reconnaîtra) confiait récemment que la course au positionnement commercial en Asie du Sud-Est s’apparente à la course à la Lune des années 1960. À la différence près qu’elle oppose les États-Unis et la Chine. Avec le PTP, les États-Unis ont pris les devants. Mme Clinton ne va pas s’auto-pelure-de-bananiser. D’ici deux ans, le PTP sera ratifié. À ce moment-là, les meilleurs entrepreneurs dans les secteurs sous gestion de l’offre auront encore le pied à fond sur l’accélérateur. Et ils seront bien avisés d’agir ainsi, dans la mesure où ils sont prêts à faire ce qu’ils font depuis des décennies : s’adapter à un environnement changeant.

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Vincent Cloutier

QUI EST VINCENT CLOUTIER
Détenteur d’un baccalauréat en agronomie de l’Université Laval et d’une maîtrise en gestion agroalimentaire, Vincent a travaillé comme économiste principal chez Sollio Agriculture.

 

vincent.cloutier@sollio.coop

QUI EST VINCENT CLOUTIER
Détenteur d’un baccalauréat en agronomie de l’Université Laval et d’une maîtrise en gestion agroalimentaire, Vincent a travaillé comme économiste principal chez Sollio Agriculture.