Le ranch Akat : Tout régler au quart de tour pour ne rien laisser au hasard
Lorsque les adversaires de Katia Messier-Jalbert et de Nicolas Lemire voient un de leurs chevaux performer lors d’une course de barils, ils savent que ce n’est pas un coup de chance. Quand leurs clients repartent avec un poulain, ils ont confiance que leur argent a été bien investi.
Rien n’est laissé au hasard au ranch Akat de Saint-Zéphirin-de-Courval dans la MRC de Nicolet-Yamaska. De la saillie à la livraison, tout a été soigneusement préparé.
À l’instar de passionnés comme elle, Katia Messier-Jalbert rêvait de posséder des chevaux depuis qu’elle avait 12 ans. « Mes parents avaient mis de l’argent de côté pour ma première voiture et j’ai acheté un cheval avec cet argent, raconte Katia avec amusement. Après mes études à l’ITA de Saint-Hyacinthe, j’ai emmené mon cheval ici (à Saint-Zéphirin-de-Courval) quand j’ai emménagé avec Nicolas. J’ai toujours voulu avoir des juments poulinières et nous avons commencé l’élevage quand je suis tombée enceinte de mon fils Zack. Je ne pouvais pas faire de course de barils, alors nous avons amorcé notre élevage. »
La base de l’élevage du ranch Akat repose sur la jument Didi, toujours à la ferme en 2024. « C’est la mère de notre meilleur cheval de compétition, bien que ce n’était pas la jument avec les meilleurs papiers, précise Katia. C’est un cheval merveilleux, Didi. Elle a un excellent tempérament. Une journée, j’ai gagné une classe, Nicolas l’a monté pour la sienne plus tard, puis elle a fait la course de barils des bouts de chou avec Zack et tout s’est passé à merveille. Nous avons réalisé que nous avions un animal au tempérament en or. Aujourd’hui, sa fille (Nala) fait la même chose. Tous ses poulains sont dans nos premiers vendus. »
« Au fils des ans, nous avons acheté des femelles exceptionnelles et nous avons fait des croisements exceptionnels, explique Katia. Ce sont des lignées de champions. Nous allons vers des croisements pour compenser les lacunes. Nous comblons les besoins de la mère, en fait. Nous cherchons l’étalon qui comblera les besoins de la jument, tant physiquement que mentalement. Pour une jument qui est super agile, mais qui manque de vitesse, nous allons choisir un mâle extrêmement rapide. Une jument trop nerveuse sera croisée avec un tempérament plus froid. »
La reproduction au ranch Akat provient essentiellement de l’insémination artificielle. Le but est encore de privilégier la qualité. « Oui, nous pourrions avoir un étalon reproducteur, dit-elle, mais c’est un peu comme avoir un taureau d’étable, tu n’avances pas génétiquement. Nos juments sont génétiquement supérieures par rapport à la moyenne en raison de notre sélection. Donc, nous tendons vers les meilleurs croisements. Nos semences viennent en général du Texas. Nous les faisons venir par avion et nous les récupérons à Mirabel. Nos champions et futurs champions sont majoritairement issus des meilleurs chevaux qui remportent les courses de barils Pink Buckle et Ruby Buckle, les plus gros shows de barils au monde. Les meilleurs étalons sont là et il y a des centres qui ne s’occupent que de ça. Nous utilisons également les transferts d’embryons avec une clinique vétérinaire au Québec et avec Viagen, en Alberta, où nous envoyons des ovules prêts à être fécondés. White Side est notre meilleure jument actuellement et elle a été croisée avec les meilleurs étalons. Elle a environ deux poulains par année. »
Une régie exceptionnelle
Katia et Nicolas travaillent en étroite collaboration avec leurs experts-conseils du réseau Sollio, soit Julie McDonald, agronome et conseillère en nutrition équine chez Sollio Agriculture, ainsi que Myriam Achhammer, technologue et experte-conseil en productions végétales et équine et Jean-Michel Laroche, agronome et directeur de la division agricole chez Covris Coopérative. Tous ont souligné la régie impeccable que Katia met en pratique.
« Je crois que ce qui est très important, c’est que rien ne soit laissé au hasard, affirme Katia Messier-Jalbert. Nous devons combler tous les besoins des chevaux, qu’ils soient alimentaires, physiques ou mentaux. Pour ce faire, nous avons une belle équipe qui nous entoure avec nos agronomes, les vétérinaires et le forgeron. Ils sont là pour nous épauler et signaler tout problème. Même si nous avons des notions, ces gens-là sont sur le terrain et sont à jour, explique Katia, qui a travaillé quelques années pour Valacta (maintenant Lactanet). Tu dois être à l’écoute de ton cheval. Tu dois être le plus précis possible. Tu dois tout voir à l’avance. Ne jamais te faire prendre par surprise, tout planifier. Le moindre signe que ton cheval te donne, tu dois intervenir, sinon ce sont des coûts énormes. Nous avons une grille de vaccins, nous savons quand une jument va pouliner et nous commençons à changer son alimentation un mois à l’avance. Je prépare une ration avec Julie [McDonald] en fonction de sa cote de chaire. Va-t-elle donner plus ou moins de lait? Rien n’est négligé. »
Ce souci du détail et de la précision est corroboré par une toute nouvelle employée du ranch Akat, Ariane Greuter, qui vient tout juste d’obtenir son diplôme d’études professionnelles en productions animales de l’ITA de La Pocatière. « Ce que je trouve bien, surtout, c’est que Katia note tout. Quand le forgeron vient, elle note quels chevaux ont été faits à telle date et ce qu’il faut surveiller. Les jours suivants, nous les observons attentivement et évaluons leur condition. Katia est très structurée. Quand quelque chose doit être fait, c’est fait », affirme celle qui a fait deux stages à la ferme avant d’être engagée sur une base permanente. Sa patronne reconnaît que la clef des succès du ranch et de la Ferme laitière Nic et Pic, qu’elle exploite avec son conjoint Nicolas Lemire, réside dans leur volonté d’effectuer un excellent suivi.
Des compétitions longuement préparées
L’agenda de Katia et de Nicolas ne comporte pas beaucoup d’espaces libres. Au cours de la saison des compétitions de barils, d’avril à octobre, vous risquez de les manquer si vous vous présentez à la ferme sans rendez-vous. La préparation des chevaux et des courses se fait toute l’année. « Nous commençons par nous assurer que les chevaux ne manquent pas de foin, que nous choisissons en fonction des besoins et de la condition de chaire, exprime Katia. Nous prenons le summum de la première et de la deuxième coupe. Une jument plus dure à faire engraisser aura un foin plus riche et, dans le cas contraire, un foin plus pauvre. Présentement, ma jument de compétition se tient plus grasse, elle n’a pas besoin de beaucoup de moulée. Chaque coupe est analysée. Nous voulons savoir ce qu’il y a dans le foin. Si tu donnes du foin de qualité à ton cheval, il va se sentir mieux. Il n’aura pas de problème d’estomac à manger à volonté de bonnes choses. Nous nettoyons également les abreuvoirs deux fois par semaine pour éviter le développement d’algues afin que les chevaux boivent une eau de qualité. »
Le calendrier de préparation fait lui aussi l’objet d’une planification rigoureuse. Les enclos et les parcs d’exercices sont nettoyés et désinfectés au besoin. Pas question de laisser un animal dans un environnement inadéquat. Même le partenaire d’enclos sera remplacé si l’harmonie n’est pas parfaite. Le programme d’entraînement est bâti en fonction des besoins des coureurs. « L’hiver, après un congé de deux ou trois mois, au tournant de Noël, nous commençons l’entraînement cardio. En mars, nous débutons les courses avec les barils avant le début de la saison des compétitions. Nous avons différents types d’entraînement. Le but est de ne pas écœurer le cheval, qu’il ait toujours le goût de t’en donner. C’est important de respecter ton cheval, d’être à l’écoute de ses besoins. Si tu le respectes, il va te le rendre », conclut Katia Messier-Jalbert.
La jeune femme en mène large au sein du ranch Akat. Le nom leur a d’ailleurs été inspiré de cette passion qui dévore la cavalière de 32 ans. « Quand j’ai eu mes premiers chevaux à la ferme, les gens demandaient à qui ils appartenaient et les employés répondaient : “C’est à Kat, les chevaux”. Donc, c’est le ranch à Kat (Akat). »
Photo : Stéphane Payette