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Les yeux rivés sur l’approvisionnement en fertilisant pour la saison 2023

Billet de Casper Kaastra, chef de la direction de Sollio Agriculture

Durant la période estivale, les activités d’approvisionnement ralentissent naturellement. Malgré des activités logistiques réduites, l’équipe de Sollio Agriculture ne relâche pas pour autant ses efforts de négociation avec les différents représentants du gouvernement afin de dénouer l’enjeu des tarifs douaniers. 

Tarifs payés pour 2022

Nous continuons de défendre auprès du gouvernement canadien que l’imposition d’un tarif douanier sur les engrais commandés avant le 2 mars ne pénalise pas les producteurs russes et n'influence pas les décisions d'achat futures des importateurs canadiens, en plus d’imposer un fardeau financier injuste aux producteurs agricoles canadiens, à un moment où le coût des intrants atteint des niveaux records.

En effet, il aurait été impossible pour Sollio Agriculture de remplacer les commandes de fertilisants en provenance de la Russie. D’abord, les commandes avaient été placées bien avant la mise en place des tarifs douaniers par le gouvernement canadien. Dans bien des cas, les produits étaient déjà fabriqués et même déjà sortis du territoire russe. Ensuite, il faut considérer que Sollio Agriculture est le fournisseur d’intrants le plus important dans l’est du pays et ne peut pas se comparer aux autres joueurs dans le marché. Ainsi, entre la tombée des sanctions et la saison des semis, il n’y avait pas assez de temps pour remplacer le volume important des commandes de Sollio Agriculture, et c’est pour nous assurer que nos actions ne contribuent pas à une crise alimentaire au Canada que nous avons choisi de maintenir nos commandes.

Soulignons par ailleurs que le Canada est le seul pays membre du G7 à avoir imposé des tarifs douaniers sur les fertilisants. La politique tarifaire canadienne entraîne un désavantage concurrentiel des coûts de production pour les agriculteurs de l’est du pays face à leurs homologues des autres pays. Nous demandons donc au gouvernement canadien de modifier la Loi sur les mesures économiques spéciales afin d'exempter les commandes de fertilisants qui ont été passées avant l'entrée en vigueur de la Loi le 2 mars 2022.

Planification de l’approvisionnement 2023

Actuellement, de nombreuses voix s’élèvent à l’international, dont celle du secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres, pour donner aux engrais russes un accès sans entrave aux marchés mondiaux pour éviter qu’un manque d’engrais en 2022 entraîne un manque de nourriture en 2023. 

C’est dans le même esprit que nous réclamons des politiques claires et cohérentes de la part du gouvernement fédéral afin de planifier l’approvisionnement pour la prochaine saison et ne pas nous retrouver dans la même situation qu’en février, alors que les changements imprévus à la politique canadienne ont mis en péril les livraisons pour la saison 2022.

Cette clarté au niveau politique est d’autant plus nécessaire que l’industrie fait face à des défis particuliers cette année pour l’approvisionnement en fertilisants azotés. En effet, les prix élevés et les enjeux de disponibilité du gaz naturel en Europe occasionnent déjà des réductions de production dans cette région. On peut s’attendre à ce que les effets se fassent sentir à l’échelle mondiale, et cela augmente le risque d’approvisionnement pour la prochaine saison, d’où le travail réalisé en amont par nos équipes d’approvisionnement pour sécuriser nos achats pour 2023.

Nous continuons aussi nos efforts de communication auprès du gouvernement à propos de l’impact de ces tarifs sur l’économie québécoise et canadienne. Nous avons la responsabilité de lui faire comprendre les nuances, les détails et les conséquences sur les consommateurs et possiblement sur l’approvisionnement en nourriture d’une telle mesure. 

Les fertilisants azotés aussi visés par les objectifs de réduction de GES du gouvernement

Alors que les producteurs doivent déjà composer avec des prix à des niveaux records, une autre ombre se pointe à l’horizon, avec la volonté du gouvernement fédéral de réduire les émissions de GES dues aux engrais azotés de l’ordre de 30 % au cours des huit prochaines années. 

Considérant que les producteurs agricoles du Québec et du Canada optimisent déjà leur utilisation d’intrant pour atteindre les meilleurs rendements, nous sommes préoccupés par un tel plan qui préconiserait des réductions de volumes appliqués et pourrait compromettre la capacité des fermes à produire la nourriture consommée ici et ailleurs dans le monde. 

Nous sommes plutôt en faveur de promouvoir les pratiques qui améliorent l'efficacité de l'utilisation des fertilisants et réduisent les émissions sans cibler la quantité ni mettre en péril la productivité. De plus, étant donné l'importance de la sécurité alimentaire, nous croyons qu'une distinction devrait être faite dans la façon dont les cibles sont établies et mises en œuvre pour les activités de production agricole et alimentaire par rapport aux cibles globales de réduction des GES pour le Canada en général.

Nous suivrons avec attention les développements autour de cette question et participons également à la consultation qui est présentement menée par le gouvernement sur le sujet.

(Photo : Sollio Agriculture)