Si vous considérez que favoriser le bien-être de vos animaux favorise leurs performances, en dites-vous de même de votre propre état de bien-être, condition essentielle de votre succès?
Cultiver l’équilibre entre bien-être et performance, c’est le sous-titre du livre Le manuel du bonheur en agriculture, réédition actuelle du livre paru en 2018. Entretien avec son autrice, l’agronome Nathalie Tanguay.
Pendant 20 ans, elle a œuvré comme conseillère en pomiculture. Puis, après des études de deuxième cycle en développement organisationnel où elle a découvert notamment la psychologie positive, cette « science de l’épanouissement » née en 1990 qui table sur les conditions pour faire fleurir le bonheur, Nathalie Tanguay a choisi de lancer sa pratique privée en accompagnement professionnel auprès de la clientèle agricole. Celle qui est née dans une ferme laitière dans Bellechasse aurait eu la fibre pour le travail de rang, car les agriculteurs et les agricultrices se confient à elle volontiers.
L’idée d’un livre qui rassemble des pensées et des outils participe d’un effort pour prévenir la détresse psychologique que l’agronome constate sur le terrain. « C’est aussi parce que la gestion des conflits, les difficultés à s’entendre et à se comprendre, la communication passive ou destructive, la rétention-fidélisation des employés, tout cela a un coût insoupçonné pour les fermes. » Or, quand ça va mal avec les autres, c’est parfois parce que l’agriculteur lui-même ne prend pas soin de lui-même. « C’est l’image du masque à oxygène dans l’avion : il faut mettre le sien avant d’aider les autres », expose la souriante coach.
Oui, mais comment être heureux quand les marchés, les infestations, la bureaucratie, les finances, la météo et la société complotent à nous rendre vulnérables? Loin du fatalisme, Nathalie Tanguay admet qu’en agriculture, on n’a souvent pas d’emprise sur les aléas, mais on peut contrôler son attitude et son état d’esprit qui influencent directement notre état de bien-être. Pour gravir la spirale du bonheur, les émotions positives devraient surpasser les négatives dans un ratio d’environ trois pour un. La joie, l’amour, l’intérêt, l’amusement, l’émerveillement, la fierté, l’inspiration, la gratitude, l’espoir et la sérénité : Nathalie Tanguay recense dix émotions à ressentir plus souvent pour polliniser son bien-être. « Le cerveau a tendance à voir plus facilement le négatif, mais on peut aussi choisir de porter le regard sur le beau, le bien et le bon! »
Cette posture de pouvoir sur son bonheur est importante. « Le livre donne des outils pour éviter le mode victime », mentionne l’autrice. Et attention à la fausse équation « succès égale bonheur », car c’est surtout l’inverse : les gens heureux tendent à mieux réussir leur vie. « Ultimement, le but, c’est d’avoir des objectifs qui nous donnent du bonheur à les atteindre », conclut-elle.
En rafale, voici ce que vous trouverez dans Le manuel du bonheur en agriculture :
- Un schéma pour se sortir de la rumination mentale et entrer dans les solutions créatives;
- La différence entre passion harmonieuse et passion obsessive;
- Les six piliers du bonheur et pourquoi les déséquilibres sont si fréquents en agriculture;
- Une liste de 24 forces, leur description et des exemples propres au milieu agricole pour revivifier ses forces plutôt que travailler sur ses faiblesses;
- Des stratégies pour faire échec aux obstacles au bonheur, notamment les nuisibles « qu’est-ce que les autres vont dire » et « on n’a pas le temps »;
- Les ingrédients pour se fixer des objectifs SMART : spécifiques, mesurables, ambitieux, réalistes, limités dans le temps;
- Des réflexions pour maintenir la flamme, son engagement, sa raison d’être;
- Pourquoi et comment le bonheur est-il un choix que nous faisons chaque jour.
Cet article est paru dans le Coopérateur de juillet-août 2025.