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Chroniques / Faits et gestes

La Russie manque de lait, mais la Russie a trop de lait

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Il y a plus d’un an, l’État russe fermait ses frontières aux produits d’origine animale en provenance des pays se trouvant sur sa liste noire.

Immédiatement, l’exportation de produits laitiers européens vers la Russie a stoppé. On se rappellera que le Canada fait aussi partie de la liste de pays « pas gentils » dressée par Vladimir Poutine, d’où l’impossibilité d’y exporter notre porc, notamment. Un embargo qui se poursuit.

Les Russes importent beaucoup de produits laitiers. L’arrêt des livraisons en provenance d’Europe a ouvert la voie à d’autres pays fournisseurs. Leur apport ne suffit toutefois pas à combler la demande interne. Résultat : pénurie de lait sur le marché russe. Voilà qui a donné des idées à bien des filous. Dans un pays miné par la corruption et la fraude, la solution est venue de l’huile de palme, ajoutée en quantité dans les citernes. Trahir son client : il n’y a pas de moyen plus efficace de massacrer l’avenir d’une industrie.

L’adultération alimentaire est un problème d’envergure. Wikipédia la définit comme une « pratique frauduleuse consistant en l’ajout d’un produit de moindre valeur à un autre produit ». Ça se passe en Russie, ça se passe en Inde, mais des exemples existent aussi dans les pays industrialisés. Pensons seulement au scandale de la viande chevaline en Europe, en 2013. Le « Horsegate » rappelle le triste souvenir de transformateurs alimentaires ayant tenté de faire passer de la viande de cheval pour du bœuf.

La méfiance du consommateur et l’attention croissante qu’il accorde à sa santé obligent l’industrie alimentaire à toujours laver plus blanc que blanc. Une réalité qui entraîne contraintes et coûts, mais offre aussi des occasions favorables. IdentiGEN a flairé la bonne affaire. Cette entreprise propose une technologie de marquage génétique prouvant qu’une saucisse de porc contient du porc, qu’un kilo de bœuf haché contient du bœuf, qu’un flacon d’huile d’olive ne contient pas une touche de 20-80. D’accord… ce dernier exemple est un peu extrême.

La confiance demeurera un enjeu clé des prochaines décennies en agroalimentaire. En ce début novembre, l’Institut canadien des politiques agricoles tient un forum national visant à déterminer comment l’industrie agroalimentaire canadienne pourrait devenir celle inspirant le plus confiance au monde. Leaders d’ici et d’ailleurs se réuniront « pour déterminer ce qui est dans l’ordre du possible pour l’industrie agroalimentaire canadienne », qui jouit déjà d’une réputation enviable à l’international.

L’enjeu interpelle l’ensemble de la chaîne de production des aliments, y compris l’agriculture. Les registres à la ferme et les outils technologiques de vérification des processus de production (le thermographe, entre autres) s’inscrivent dans cette lignée. Dans bien des cas, ils ajoutent une inévitable lourdeur au processus de production. Mais leurs bénéfices dépassent largement les coûts. Ils constituent un argument essentiel pour rassurer les consommateurs sur l’excellence de notre offre alimentaire.

Dans le contexte actuel des marchés, où l’on récompense la transparence, la durabilité et l’éthique, il faut non seulement penser à les maintenir, mais aussi viser à les renforcer.

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Vincent Cloutier

QUI EST VINCENT CLOUTIER
Détenteur d’un baccalauréat en agronomie de l’Université Laval et d’une maîtrise en gestion agroalimentaire, Vincent a travaillé comme économiste principal chez Sollio Agriculture.

 

vincent.cloutier@sollio.coop

QUI EST VINCENT CLOUTIER
Détenteur d’un baccalauréat en agronomie de l’Université Laval et d’une maîtrise en gestion agroalimentaire, Vincent a travaillé comme économiste principal chez Sollio Agriculture.