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La Ferme d’élevage Samson : tous les chemins mènent à la terre

La Coop Sainte-Justine

Au cœur de Saint-Prosper en Beauce, Pierre-Olivier, Frédéric et Hugo Samson cultivent plus de 1000 hectares (2500 acres) de terre en grandes cultures, mais surtout en foin et en pacages pour leurs vaches bien-aimées. Les frères Samson exploitent un troupeau d’environ 650 vaches au cœur de leur entreprise familiale, membre de La Coop Sainte-Justine, et qu’ils ont su reconnecter aux racines familiales.

Tout débute avec les arrière-grands-parents des trois frères qui exploitaient une ferme laitière à Saint-Prosper. « C’était une grosse ferme pour l’époque, il y avait autour de 30 vaches, c’était beaucoup à tirer à la main », raconte Hugo. Faute de relève, l’aventure s’arrête jusqu’à ce qu’une nouvelle mouture, plus gentleman farmer, reparte sur les bases de l’ancienne entreprise grâce à la grand-mère et au père des frères qui rachètent la ferme familiale pour l’exploiter davantage par amour et passion que pour la rentabilité. « On parle d’un peu plus d’une centaine d’acres et d’une trentaine de vaches. Notre grand-mère était passionnée, elle avait la fibre agricole et voulait nous montrer comment faire », continue Hugo.

Croître pour soutenir la famille

Peu d’indices laissaient présager que la nouvelle génération ferait croître la ferme avec tant de succès, alors que les trois frères effectuent leurs études supérieures. C’est en terminant ses études à HEC Montréal que Pierre-Olivier réalise qu’il désire reprendre l’entreprise pour en vivre. « De 2003 à 2008, j’ai vécu comme un étudiant pour pouvoir grossir l’entreprise, on a même cessé de se verser un salaire l’année où on a construit la pouponnière à porcelets », se remémore l’initiateur de la ferme. Dès les débuts, il en parle à ses frères. Frédéric, intéressé par le projet, se joint à la ferme à temps plein quelques années plus tard et Hugo prend en charge la croissance du troupeau tout en conservant son emploi d’enseignant.

C’est la construction de la pouponnière de porcelets qui permet à Frédéric de se joindre à Pierre-Olivier et de se lancer dans l’aventure à pieds joints en 2006. « Ce n’est pas facile de dégager des marges dans le bœuf, surtout les premières années. Avec le porc, on a réussi à aller chercher des contrats et à avoir des rentrées monétaires à l’année », décortique Frédéric. L’engraissement, développé en copropriété avec un employé (la Ferme Poulin et Samson), est venu grandir le volet porcin en 2019.

« On a commencé dans le temps de la vache folle. Tout le monde lâchait le secteur qui était en déclin et on se faisait offrir des terres pas chères », affirme Pierre-Olivier. Le producteur affirme que la situation était stressante, mais la ferme a réussi à tirer profit des circonstances moroses de la crise. « Il est arrivé qu’on veuille acheter seulement quelques vaches d’un producteur qui délaissait le secteur et qu’on reparte avec le troupeau au complet », se rappellent les frères Samson en riant.

Séparer les tâches pour se spécialiser

Pierre-Olivier joue le rôle de coordonnateur au quotidien dans l’entreprise. C’est lui qui s’occupe d’assigner les différentes tâches et les différents sites aux employés. « J’ai étudié en gestion des opérations et de la production. Je suis dans la logistique et je m’occupe de l’ouvrage aux champs », détaille-t-il. La relation d’affaires avec les clients s’ajoute aussi à ses responsabilités.

Hugo, enseignant à temps plein, s’implique principalement dans les vêlages et la génétique du troupeau. Il passe son été à côtoyer les bêtes et à pourvoir à leurs besoins. « Je fais environ 450 vêlages par été. L’été, je suis vraiment à temps plein avec eux. On peut monter à plus d’une vingtaine de vêlages par jour lors de la plus grosse semaine de l’été. Je dois organiser et mémoriser les vêlages, puis m’assurer de voir les veaux, de les voir boire leur colostrum ou de leur en donner et de m’occuper des jumeaux ou des veaux abandonnés. » Son fils Charles-Émile étudie d’ailleurs en agriculture au Cégep de Lévis et l’aide les fins de semaine et l’été.

Frédéric, qui a lui aussi fait des études à HEC Montréal et qui a un profil de comptable, est responsable de l’administration de l’entreprise et du volet porcin. Son fils Benoît passe aussi beaucoup de temps à la ferme. Il aide avec la ration des veaux, la machinerie, les travaux aux champs et aime tous les aspects de l’entreprise.

Les frères expliquent que ce sont un peu leurs rôles naturels au sein de la famille qui ont déterminé leurs rôles professionnels.

Une nouvelle génération sur le terrain

Ces producteurs agricoles de Saint-Prosper ont de la chance : plusieurs de leurs enfants sont intéressés par l’entreprise familiale et certains contribuent assez régulièrement aux activités.

« Quand ça fait un bout que t’es là-dedans, tu te demandes où tu t’en vas avec ça. Quand tu dépasses la quarantaine, tu te questionnes, c’est beaucoup d’énergie, mais quand tu vois qu’il y a de l’intérêt pour une reprise familiale, ça redonne le goût! Les enfants participent, c’est beaucoup de motivation et ça nous donne envie de continuer à faire des projets », raconte Pierre-Olivier. « En vieillissant, les enfants partagent de plus en plus de responsabilités avec nous et on développe une belle complémentarité. »

« L’objectif, plus tard, c’est que leurs noms soient sur la pancarte de l’entreprise et qu’on les appelle le matin pour leur demander quel est l’ouvrage à faire », rigole Pierre-Olivier concernant l’éventuelle reprise de l’entreprise par la relève familiale. D’ailleurs, son fils Louis-Joseph, 11 ans, est bien déterminé à faire de l’agriculture sa profession à l’image de ses cousins.

« Ça nous permet d’envisager une belle retraite », renchérit Hugo. « On a atteint le stade où l’on se fait dépasser par les jeunes sur les tracteurs. Lorsqu’on achète un tracteur, ils ont déjà regardé les vidéos YouTube pour savoir comment le conduire et utiliser ses différentes fonctions. Ils l’ont même utilisé dans le jeu Farming Simulator », ajoute en riant Frédéric.

Se concentrer sur les besoins du marché

« Bruno Langlois nous a vraiment beaucoup aidés à nos débuts, c’est un des plus grands spécialistes au Québec. Il nous a semé la graine dans la tête de faire du sevrage hâtif, pratiquement personne ne faisait ça. Ça nous a permis de croître et d’atteindre un aussi gros troupeau », raconte Frédéric en parlant de l’agronome spécialisé dans la production bovine qui a fait carrière chez Sollio Agriculture. Cette croissance rapide s’est aussi réalisée grâce à leur gestion des vêlages en bloc, principalement en été.

L’été, les veaux sont dehors avec leur mère et l’automne, ils sont sevrés en groupe. Les mâles et quelques femelles sont envoyés dans les parcs d’engraissement. Toutefois, les mâles les plus prometteurs quant à leur génétique sont sélectionnés par Hugo. « On mise vraiment sur la qualité des taureaux, c’est très important pour nous. À la grosseur du troupeau, la reproduction est toute faite naturellement avec des taureaux, nous en avons une quarantaine », ajoute le responsable des vêlages et de la reproduction.

« On vise à envoyer les veaux vers les parcs lorsqu’ils atteignent 360 kg (800 lb). Ils mangent, sont habitués aux mangeoires linéaires et prêts à côtoyer des bœufs », explique Frédéric.

Jessica Guay-Jolicoeur, agronome et conseillère dans l’équipe Opti-Bœuf de Sollio Agriculture, explique que les techniques de l’entreprise permettent la vente de bovins qui arrivent moins stressés en lot dans les parcs d’engraissement. « Les veaux ont grandi ensemble, ils se connaissent, ils sont habitués à s’alimenter comme dans les parcs. Ils mangent tout de suite, grosso modo, ils sont moins stressés et c’est un plus pour les clients », mentionne-t-elle.

Le marché de la taure de reproduction occupe aussi une partie importante de l’entreprise; entre 150 et 200 taures sont vendues chaque année. « Elles sont presque toutes vendues d’avance. On porte une attention particulière aux besoins de nos clients et la publicité s’est faite par bouche-à-oreille depuis le début de notre élevage », explique Frédéric.

Les choix de races des frères Samson sont majoritairement dans la Simmental, la Hereford et la Angus. Des essais ont lieu en continu et suivent toujours les tendances du marché. L’alignement à court et à moyen termes est d’ailleurs du côté des Hereford et des Angus. « Pour nous, c’est important la facilité au vêlage considérant la grosseur du troupeau », justifie Hugo.

Photo par Tristan Cloutier: Une partie du clan Samson devant le bâtiment original de la ferme. De gauche à droite : Benoît, Pierre-Olivier, Frédéric et Hugo. 

Tristan Cloutier agr.